Trois cents ans après les évènements de "La Planète des Singes - Suprématie", alors que les humains ne sont plus qu'une espèce en voie d'extinction retournée à l'état sauvage, les singes sont désormais maîtres de la Terre et n'ont jamais été aussi proches de rejoindre l'évolution d'eux que l'on a connue dans le film culte de 1968.
Cherchant à faire ses preuves au sein de son clan avec ses camarades d'enfance, un jeune chimpanzé du nom de Noa voit soudain sa tribu attaquée par d'autres amateurs de bananes se réclamant de la figure d'un certain César...
Reprendre le flambeau après la trilogie marquée de la patte qualitative de Matt Reeves était un pari risqué, surtout lorsqu'on s'appelle Wes Ball et que l'on n'a que la trilogie teen-dystopique "Le Labyrinthe" dans les bagages les plus connus de sa filmographie. On a en effet beau faire partie des défenseurs de cette dernière (une des plus réussies en son genre), on doutait quand même fortement des capacités du metteur en scène à s'aventurer avec autant de talent en terres simiesques que Matt Reeves avait su le démontrer lors des deux derniers opus (rappelons d'ailleurs que "Les Origines" est signé Rupert Wyatt). Et, pourtant, si "La Planète des Singes: Le Nouveau Royaume" tend à aller dans le sens de cette intuition en ne parvenant peut-être pas à rivaliser avec ses derniers prédécesseurs, il n'en demeure pas moins un prolongement très recommandable.
D'abord, visuellement, le film de Wes Ball se révèle efficace à défaut de réinventer les fondamentaux initiés avant lui.
Avec le soutien d'effets spéciaux qui n'ont probablement jamais autant rendu les protagonistes singes si "palpables" et fait de leur anthropomorphisme le véhicule d'une vraie belle palette d'émotions encore plus subtiles à travers chacun de leurs regards, ce "Nouveau Royaume" arrive à se montrer aussi convaincant en termes de phases d'action inhérentes à son cahier des charges, d'une scène ouverture épousant le verticalisme d'une progression de primates à ses affrontements inter-espèces de plus en plus impitoyables au fil du récit, que lors de ses moments plus intimistes, prenant le temps de créer un réel attachement à ses bébêtes poilues prises dans la tempête d'événements tragiques (mention spéciale aux membres du clan originel, le maladroit Anaya en tête). Combinant ses deux aspects au diapason de l'évolution de certains piliers mis en place au début du film, l'affrontement final (et celui qui le précède face un des ennemis les plus massifs) est un parfait point d'orgue à la bonne tenue d'un divertissement dont on espère forcément du grand spectacle qui fasse vibrer.
Plutôt pertinent également dans son discours universel sur le dévoiement des mythes et ceux qui se dissimulent derrière en se les accaparant pour assouvir leur propre soif de pouvoir (en ce sens, Proximus est un vilain réussi, très bien modelé sur son interprète Kevin Durand dont on reconnaît beaucoup d'expressions), "Le Nouveau Royaume" va évidemment dans cette optique reproduire dans ces conflits simiesques les pendants les plus louables ou moins reluisants des humains, tout en y mêlant directement les représentants de nous autres bipèdes et cette question sur la possible ou non coexistence de nos deux espèces...
Et c'est peut-être là que le film se montre le plus attendu quant à ce qu'un épisode d'une saga comme "La Planète des Singes" a proposé. Certes, les angles d'approche ont beau suivre un autre chemin que précédemment, permettant de nouvelles interactions et moments poétiques au sein de ce périple belliqueux (ainsi que pas mal de rappels à des moments-clés des films précédents sans en avoir la pleine puissance, on pense à une révélation "vocale" notamment)... Mais, en se contentant de finalement passer en revue et se faire confronter tous les types de comportements possibles que l'humain pourrait adopter derrière ses cousins primates dans le but de ne déboucher à nouveau que sur cette éternelle interrogation à la portée universelle, on ne peut pas dire que ce dernier opus fasse vraiment avancer les choses au sein de la franchise.
Et, malgré le beau parallèle singe/humain qu'offre l'épilogue du film, son ultime révélation (qui laisse perplexe à bien des niveaux) n'est peut-être pas le rebondissement le plus habile pour apporter de véritables variations substantielles aux propos qui habitent désormais cette nouvelle "Planète des Singes"
Cependant, on sera bien là pour le découvrir lors des prochains longs-métrages qui s'annoncent car, même si Noa n'est pas si différent de son ancêtre César dans ce qu'il a à offrir comme combats intérieurs et extérieurs à cette civilisation des singes, il les mène toujours d'une manière à nous hérisser le poil avec lui. Ensemble, spectateurs et singes forts !