La réunion des talents méconnus (ou presque)

La pluie qui chante est un film musical qui raconte la vie du grand compositeur Jerome Kern, mort peut de temps avant la fin du tournage. Kern est une référence en matière de comédie musicale. On lui doit notamment Show Boat, son oeuvre la plus connue.
Le film s'ouvre justement sur la scène de Broadway avec des numéros musicaux de Show Boat. Il n'y a pas à dire, Ol' Man River est une des chansons les plus émouvantes de l'histoire. Le film ne commence donc pas directement, dans le sens où plusieurs numéros musicaux s’enchaînent. On a un duo Kathryn Grayson (que j'avais trouvé détestable dans Escale à Hollywood) et Tony Martin, qui a un grand talent. C'est très coloré, c'est très beau. On enchaîne sur une chanson de Virginia O'bien, qui apparaît toujours aussi blasée, puis de la glorieuse Lena Horne. Après une quinzaine de minutes, on rentre véritablement dans l'histoire.
Certes l'histoire est très romancée, mais la relation entre Jerome Kern (joué par Robert Walker, le psychopathe de L'inconnu du Nord Express, qui parait trop gentil ici) et le personnage de Van Heflin est très poétique. C'est une histoire d'amour pour la musique qui se construit entre ces deux. Il y a aussi une petite fille nommée, Sally, qui est très insupportable mais qui le sera encore plus en grandissant. Je regrette que le personnage de Walker ne fasse que pleurer sur son sort, à se demander si le personnage n'est pas au bord du suicide toutes les cinq minutes (NE REGARDEZ PAS LA VF C'EST PIRE). Je n'ai d'ailleurs pas compris pourquoi tout était montré de façon si dramatique dans le film, car rien ne l'est vraiment (mis à part la mort de Heflin). Les moments entre Heflin et Walker possèdent une très belle photographie, avec des couleurs automnales rendant les scènes mélancoliques.
Il faut savoir que c'est un biopic qui essaie de raconter les grandes étapes de la vie de Kern mais qui nous impose des passages légèrement inintéressants. Je pense par exemple à toute la rencontre entre Kern et sa femme qui est d'une grande niaiserie. Je pense par exemple au pic-nic entre les deux pendant lequel une discussion totalement vide a lieu. Il est aussi important de souligner que la musique n’apparaît pas dans les scènes pour raconter l'histoire mais qu'elle ne sert que lors de spectacles et numéros musicaux.
A l'age de 16 ans la petite Sally quitte donc le domicile de son père pour avoir sa propre carrière, cette dernière n'ayant pas le talent requis. Je ne supporte pas vraiment Lucille Bremer, mais elle danse très bien (oui ce n'est pas elle qui chante). Malheureusement pour elle (mais pas pour moi), c'est bel et bien Van Johnson qui lui vole la vedette avec le fantastique I Won't Dance.
Mais la force véritable du film vient des numéros de Judy Garland. Cette dernière était enceinte pendant le tournage est apparaît encore plus magnifique que d'habitude. Il est clair qu'elle était la plus belle et la plus talentueuse des personnalités des années 40. Surtout que cette dernière est filmée par Vincente Minnelli et on remarque directement qu'il filme sa muse, et pas une actrice quelconque. Ses numéros se démarquent de tous les autres, on voit que c'est filmé avec technique, avec amour.
Les numéros finaux rendent hommage à Kern. Frank Sinatra (tout jeune, tout maigre) livre un chant puissant, comme un dernier hommage à Kern. Que l'on connaisse ou non son nom, on a déjà tous entendu une chanson composée par Jerome Kern.
J'ai appelé ma critique comme ça parce que La pluie qui chante est un film qui me tient beaucoup à cœur en tant que passionnée de film musicaux et comédies musicales. C'est toujours un véritable bonheur de retrouver autant de talents dans le même film. Alors oui, la distribution ne fait pas toujours un film. Mais ici, chaque artistes rendent hommage à Kern. Pour moi c'est toujours un plaisir de retrouver des acteurs que tout le monde ne connait pas forcément, surtout les petites stars oubliées de la MGM.
Plus qu'une critique, c'est un petit hommage à ces artistes que je souhaite rendre : Ray McDonald, Gower Champion, June Allyson, Dinah Shore, etc. D'ailleurs je regrette d'avoir vu Cyd Charisse et Gower Champion au générique pour une scène qui dure moins d'une minute ... Par ailleurs, les numéros de June Allyson valent véritablement le coup, surtout celui sous la pluie qui me rappelle le Run, Little Raindrop, Run de Betty Grable et John Payne (Springtime in the Rockies)
Finalement, ce film peut sembler insignifiant, niais et mou pour certains cinéphiles mais c'est une véritable perle pour les amateurs de comédies musicales dramatiques.