Cette luxueuse adaptation du roman éponyme de madame de La Fayette écrit en 1678 m'avait lors d'un premier visionnage, plutôt ennuyé, et puis revu récemment, je le vois avec plus de sérieux et plus d'intérêt. Déjà le roman était lui aussi ennuyeux, on m'avait forcé à le lire, ce fut peut-être aussi un rejet de ma part pour le film, mais j'ai constaté souvent que les films adaptés de romans qui m'avaient barbé, passaient mieux, c'est le cas ici.
C'est une adaptation ultra académique, sans réelle audace ni rythme, aux accents d'abord romanesques et au cadre historique idéalisé (cour de Henri II, dans un décor Renaissance extrêmement luxueux), mais qui contribue à situer les personnages au niveau de l'aptitude spirituelle qui les rend assez fascinants. Ce roman de l'abnégation amoureuse d'une femme si vertueuse et si fidèle à son époux en ce XVIème siècle déjà tellement dévergondé, montrait aux libertins du siècle suivant (celui où vécut madame de La Fayette) où pouvait se nicher la vertu et ce qu'elle avait de noble. Ensuite, le remord de cette épouse qui à cause de son aveu a provoqué le désespoir et la mort de son époux, entrainera sa chute en forme d'expiation ; tout ceci avait quelque chose de grand autrefois, aujourd'hui, ces sentiments nous sont étrangers, ça n'existe plus dans notre vie moderne, c'est sans doute ce qui m'avait ennuyé avec ce roman, mais c'est intéressant de les découvrir, de voir comment c'était en ces temps anciens.
Delannoy qui fut la principale cible de la Nouvelle Vague qui lui reprochait son académisme et la froideur de ses réalisations, parvient ici malgré un manque d'audace, à donner vie avec sincérité à ce drame de la passion amoureuse, comme il l'avait fait dans Notre-Dame de Paris, grâce à une direction artistique très soignée, des costumes magnifiques, des scènes nombreuses tournées au château de Chambord, de beaux dialogues et des acteurs superbes, avec une Marina Vlady au summum de sa beauté (ici virginale), et un Jean Marais très amoureux. Seul Jean-François Poron n'est pas dans le ton ; acteur de télévision honnête, il campe un duc de Nemours assez fade et pas assez passionné, il aurait fallu plus de fougue et plus de charisme avec un acteur beau gosse comme Jean-Pierre Cassel ou même Alain Delon (qui avait prouvé son aptitude dans les films à costumes). Ceci étant, le film même s'il est un peu statique, est plein de qualités et mérite qu'on s'y intéresse, il fut d'ailleurs un franc succès public à sa sortie, car il montrait à la société des années 60, le portrait d'une femme modèle.