La Rançon est un film qui m'a curieusement marqué. Vu une fois pendant mon adolescence, j'avas le souvenir d'un thriller plutôt efficace qui faisait évoluer son scénario d'une façon assez percutante et qui possédait un retournement de situation maousse moins stupide que prévu. Après revisionnage, j'hésitais entre le 6/10 ou le 5 avec un coeur...
C'était donc la période où Mel Gibson, excellent acteur alors dans la vague, enchaînait les projets sans vraiment lire le scénario (Théorie de complots entre autres, le pire était à venir avec Ce que veulent les femmes), puisque ça marcherait. L'investissement était toutefois présent, puisque Mel est pour l'essentiel du capital sympathie de ce thriller bien carrossé mais finalement assez pataud. A l'image du côté un peu trash qu'il essaye de se donner avec la détention du gosse qui consiste surtout à l'attacher à un lit avec du hard rock dans le fond, espérons qu'il ne finisse pas corrompu par cette musique de sauvages. Sans cynisme, le film a plusieurs détails vraiment déplacés qui le plombent assez vite. Passent encore les clichés des hommes de main qui sont purement fonctionnels, c'est le traitement du père de famille qui lancera le plus de polémique, mais pas dans la direction que le film cherchait à pointer. Le film lui donne comme faiblesse d'avoir violer la loi pour contourner une période de grève et ainsi sauver son entreprise. Cette faiblesse est exploitée à deux reprises, ce qui s'intègre finalement bien dans l'ensemble sans nuire un instant au capital sympathie du personnage. C'est davantage dans sa mentalité républicaine réac que le personnage finit par semer le doute, au moment où il retourne la situation à son avantage en lançant son offre. Le retournement est suffisamment costaud pour créer la surprise et l'admiration d'un certain côté, et dans les faits, c'est surtout le gros richard qui refuse de payer et qui menace pour forcer la situation. Le retournement sécuritaire est alors un leurre, car même dans une telle situation, les chances de survie du gamin deviennent encore plus précaires. Le film tente de consolider sa position en ayant donné l'assurance que les ravisseurs allaient tuer l'enfant, ce qui confère au plan un côté dernière chance. Assez improbable toutefois. Le film adopte alors une attitude un peu ambiguë vis à vis des classes sociales. Il essaye de créer une dimension de "vengeance sociale" où des pauvres surgissent pour rappeler aux riches que les exploitants doivent aussi payer. Mais cela est maladroit et surtout complètement tourné en faveur des riches. On ne sent pas une minute de spontanéité dans cette tension sociale, qui ne passe finalement que par un petit monologue et un dialogue final (surement que les détails du quotidien des ravisseurs devaient remplir les blancs). Et voilà l'enquêteur qui déclare "Chérie, embrasse notre fille pour moi... Quelle chance on a de pas avoir un rond ! Être riche, vraiment, c'est une malédiction...". Ce genre de détail manque tellement de subtilité et d'honnêteté qu'avoir osé le mettre relève de l'inconscience. Dernier point moralement douteux, le final qui tourne en règlement de compte. Le thriller se débrouille assez bien pour garder le rythme jusqu'au bout, et voilà qu'il faut un dénouement à la john wayne. En abattant à bout portant le dernier ravisseur qu'il fallait donc tuer, pour que la Famille soit sûre à tout jamais... Mais cette prise de position est si lourde dans le réactionnaire qu'elle annihile tout sérieux dans cette issue qui sent bon la naphtaline (très pratique, moralement, ce révolver caché qui autorise la mise à mort).
La rançon est un thriller finalement assez mou question rythme, qui recherche l'efficacité sans toutefois taper bien loin. Il a toutefois l'avantage d'avoir un script étoffé (il fait un joli tour de son sujet) et un retournement badass qui donne envie de boire une bière. Le personnage du père est finalement en demi teinte, mais remarquablement interprété par Mel Gibson. L'investissement de l'acteur est clairement palpable à chaque séquence du film, et c'est finalement pour cela qu'il en devient attachant malgré la moralité très orientée du scénario. Dans le drame ou l'action, il est d'une spontanéité qui touche et fonctionne à merveille. Et en cela, il parvient à sauver le film de la catastrophe. Il repasse de temps en temps donc inutile de l'acheter, l'essentiel vous restera en mémoire dès le premier visionnage.