LA SECTE DES CANNIBALES démarre comme un très classique film d'aventures. Une personne part à la recherche d'un membre de sa famille disparue au cours d'un périple exotique ; elle se fait aider dans son entreprise par un guide d'origine occidentale. Ce point de départ, qu'on trouve déjà dans le roman classique "Les mines du roi Salomon" de H. Rider Haggard et ses adaptations cinématographiques, avait été repris peu avant dans LA MONTAGNE DU DIEU CANNIBALE. Ce n'est pas le seul emprunt fait au film de Martino, puisque des stock shots (le rituel dans la caverne par exemple) proviennent de cette oeuvre. On reconnaît aussi des scènes récupérées dans AU PAYS DE L'EXORCISME (l'agression d'une jeune fille au bord de la rivière) ou du DERNIER MONDE CANNIBALE (le calvaire de Me Me Lai). Il est donc d'autant plus naturel d'y retrouver certains éléments incontournables de ce style de cinéma, comme des plans gore au cours desquels des indigènes hirsutes savourent, en fins gourmets, qui un pied, qui une jambe, en exprimant par des râles réjouis leur délectation.

La gratuité est bien sûr de mise, notamment dans des scènes de violence sexuelle, souvent complètement inutiles au récit, ou des mises à mort d'animaux. Qu'on se rassure, assez peu de petites bêtes ont du souffrir sur le tournage de LA SECTE DES CANNIBALES, une grande part de ces plans semblant venir de stock shots ! L'action est censée se dérouler en Nouvelle-Guinée, mais les figurants sri-lankais n'ont vraiment pas l'apparence des indigènes de cette région. Qui plus est, le film mystérieux trouvé par la police nous montre un monument bouddhique (déjà très improbable en Nouvelle-Guinée qui n'a jamais été une terre de Bouddhisme) que le spécialiste incarné par Mel Ferrer semble avoir du mal à identifier. Heureusement, l'équipe de DeVilDead est en mesure de vous révéler qu'il s'agit du "grand Bouddha couché" du site de Pollonaruwa, un des monuments les plus célèbres du Sri Lanka ! Qui plus est, selon les stock shots utilisés, les cannibales ont des physiques et des costumes plutôt amazoniens, mélanésiens ou extrême-orientaux... Tous ces détails gênent la crédibilité des évènements et, surtout, soulignent la nonchalance générale du projet.

A tout cela viennent s'ajouter de graves problèmes au niveau de l'interprétation des seconds rôles. Ferrer passe chercher son chèque en ayant l'air de se ficher complètement de ce qui se passe. Quant aux indigènes, ils oscillent entre l'absence d'expression la plus brute et les grimaces les plus débiles, tout en marmonnant des "Wanga Wanga" du plus ridicule effet. Les dialogues sont presque toujours d'une parfaite crétinerie, ce qui a au moins le mérite de faire sourire le spectateur de loin en loin. Quant à toute la laborieuse partie de l'action tournant autour du gourou Jonas et de ses méthodes de manipulation, elle est d'une platitude et d'une sottise effroyables. Se rajoutent encore quelques couches de poujadisme (des politiciens véreux tentent de cacher l'existence des cannibales !) et de machisme déplaisant (Mark doit gifler Sheila plus souvent qu'il ne l'embrasse !). Tout cela fait beaucoup pour un seul film !

Heureusement, tout n'est pas à jeter dans LA SECTE DES CANNIBALES. Les principaux interprètes font globalement preuve d'un entrain sympathique, voire s'investissent dans leur rôle, comme Ivan Rassimov en gourou délirant. L'action bénéficie toujours d'un certain rythme et les extérieurs sont raisonnablement dépaysants. Enfin, on ne peut pas nier une certaine fascination pour ce film opportuniste et racoleur, déplaisant par son mauvais goût débridé et sa manière infantile d'exploiter une tragédie réelle ; mais aussi divertissant par son tempo et ses audaces dénuées de complexes.

LA SECTE DES CANNIBALES n'est certainement pas un incontournable du cinéma fantastique. Néanmoins, sa nonchalance, son humour involontaire et son aspect racoleur en font un "must" pour les amateurs de ces films fauchés et délirants qui constituaient le fond du panier du cinéma populaire italien de l'époque.
iGore
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le 20 oct. 2011

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