Arnaque, crime et spiritualisme
Un peu oublié, "La sorcière" (très mauvaise traduction du titre original "The mystic"), est un film typiquement Browningien, d'un réalisateur qui a déjà trouvé son style. Une attirance pour le monde...
le 13 mai 2024
Pas l'ombre d'une sorcière, évidemment, dans ce film de Tod Browning dont le titre français a été traduit à l'époque par des distributeurs cocaïnomanes qui n'ont pas pris le soin de constater qu'il s'agit en réalité d'une magicienne. Le scénario est plutôt étrange et comporte de nombreuses bizarreries qui s'oublient malgré tout assez facilement, avant tout grâce à l'ambiance si particulière des films de Tod Browning : un Américain recrute en Hongrie une gitane très douée pour les tours de magie, au détour d'un carnaval, dans le but de réaliser quelques escroqueries de retour aux États-Unis. Il est vaguement question de riche héritière dont il souhaiterait récupérer la fortune, et le subterfuge mis en place par le gang des trois personnes évoque très fortement celui à l'œuvre dans The Unholy Three, sorti la même année et bénéficiant, lui, de la présence de Lon Chaney.
Le cœur du film est clairement au niveau de l'arnaque : la femme se fait passer pour une médium capable d'invoquer les esprits, et lorsque la salle où elle se produit est plongée dans le noir, elle fait apparaître des formes ou animer des objets. En réalité, il s'agit d'un complice tout de noir vêtu, qui s'est glissé par une minuscule trappe secrète, et qui réalise les animations. Il y a même une séquence faisant intervenir une chaîne humaine dont l'intégrité est vérifiée par les arnaqueurs à l'aide d'un courant circulant dans le circuit ainsi fermé... On retrouve ainsi dans The Mystic une imagerie caractéristique du style Browning, mettant sur le devant de la scène des malfrats et travaillant des atmosphères aussi noires qu'inquiétantes vraiment originales pour l'époque. En tout état de cause, une mise en scène qui se montre particulièrement éloquente et persuasive puisque les trois escrocs arrivent à leurs fins et parviennent à mettre la main sur un gros magot.
Sauf qu'une série de divergences, conclusion d'une tension latente qui s'est sagement construite dans l'arrière-plan durant tout le film, explose évidemment au moment où tout pourrait "bien" se terminer. Au sein de la bande de voleurs, plusieurs triangles amoureux incompatibles se forment et posent un imbroglio final intéressant, mais malheureusement résolu un peu trop vite. Entre le moment où les embrouilles commencent sérieusement, quand tout le monde sort les armes, et la fin, tout est rentré dans l'ordre sans que personne ne soit vraiment malmené. Pas de prison, pas de blessure, pas de gain, pas de perte : un peu trop facile.
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Créée
le 5 nov. 2023
Critique lue 23 fois
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