Pas de longueurs, un sujet original, un casting enthousiasmant, des plans qui tuent, La Troisième Guerre est une jolie réussite que je vous conseille fortement.


« La troisième guerre » suit le quotidien de trois soldats – magistralement interprétés par Anthony Bajon, Leïla Bekhti et Karim Leklou - missionnés sur l’Opération Sentinelle et chargés de surveiller les rues pour protéger les citoyens de potentielles menaces terroristes.


Nous sommes en guerre !
S’emparer de l’Opération Sentinelle pour nous en montrer les rouages de l’intérieur est une bonne idée et apporte une certaine fraîcheur au cinéma hexagonal qui se renouvelle et se diversifie de plus en plus ces temps-ci. Le plus cocasse néanmoins est que son réalisateur, Giovanni Aloi - dont c’est ici le premier long-métrage - est italien, et pourtant sa vision sur notre société et ses traumatismes est d’une acuité surprenante.


L’Opération Sentinelle est filmée à la manière d’un film de guerre tant et si bien que nous voilà plongé dans le regard méfiant et paranoïaque de ces (pour la plupart) très jeunes militaires. Leur vision déformée devient la nôtre, s’empare de nous et affole nos rétines. En effet, jamais Paris n’aura paru si inquiétant, si anxiogène. Et pourtant…


« Je veux être utile » clame sans cesse Léo (Anthony Bajon) tandis que sa quête de sens se dilue dans l’ennui du quotidien, l’absence d’événements et le néant car finalement rien ou presque n’arrive jamais. Entre fausses alertes, intoxs et vacuité des situations, les journées deviennent pesantes pour notre trio de soldats. Errer dans les rues, déambuler à la recherche d’un potentiel danger qui ne surgit jamais, se retrouver face à l’incompréhension de la population qu’ils sont censés protéger, le film souligne ces situations jusqu’aux confins de l’absurde.


Le métrage alterne adroitement l'apathie de ce quotidien répétitif, l'angoisse de ce qui pourrait advenir et les scènes de décompression à la caserne entre bidasses. Un mix détonnant et efficace. Le réalisateur filme l’ennui de ses personnages avec une passion communicative car paradoxalement on ne s’ennuie jamais à la vision du film. Hormis le trio de tête, la bande d’acteurs secondaires est magnifiquement castée. Leurs échanges, leurs punchlines et leurs interactions nourrissent le film y insufflant fraîcheur et adrénaline.


Et puisqu’on parle du casting, une fois de plus, Anthony Bajon est extraordinaire. Son visage candide et pourtant proche de la rupture est hypnotisant et fascinant. La caméra ne s'y trompe pas, filmant en plans serrés son visage poupin, contribuant à l'immersion du spectateur. Le réalisateur se permet des plans déments juste sur la petite surface du visage de Bajon qu’il vient habilement peindre de son pinceau de lumière. Ce qui s’en dégage est ahurissant.


Malgré une fin un peu abrupte, « La troisième guerre » fascine et hypnotise. Le métrage délivre une tension éprouvante renforcée par le choix assumé de filmer au plus près les visages des principaux protagonistes. Giovanni Aloi force le respect avec une maîtrise totale de son sujet qu’il dynamite fréquemment de scènes plus lumineuses et cocasses créant un équilibre parfait.


https://cestcontagieux.com/2021/09/22/la-troisieme-guerre-de-giovanni-aloi-la-chronique-en-bandouliere/

David_Smadja
7
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le 22 sept. 2021

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David Smadja

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