Un film qui laisse sa trace dans l’esprit. Cette œuvre du cinéma allemand basée ( et largement adapté) sur des faits réels s’organise assez bien pour faire monter progressivement une tension effroyable. Un sujet brillant, qui brise immédiatement les appréhensions aux teintes rébarbatives et ennuyeuses de certains, et qui donne à réfléchir. La question d’un nouveau régime totalitaire se pose éternellement et La Vague nous donne une hypothèse plus que probable.
Le film, qui évite de trop tirer sur la corde sensible, se focalise sur la puissance de l’influence et de l’embrigadement, qui prend effectivement plus d’une forme pour arriver à ses fins, cela basé sur l’esprit adolescent, encore fragile et malléable. Car l’expérience est plus que louable, prônant des valeurs de partage et de soutient, excluant toute idée d’individualisme (par conséquent l’égoïsme, l’intolérance, … autant de principes aussi nobles qu’idéalistes) au sein de la communauté, mais l’on réalise très rapidement que « la vague » agit de la même façon qu’un seul et même individu. Un groupe soudé qui se bat pour des valeurs à étendre sur le reste de la communauté mais qui finalement persécute les avis divergents de ses idéaux, et dont les membres n’instaurent leurs règles qu’au sein même de leur groupe. En d’autres termes, un comportement parfaitement similaire à ce qu’ils exècrent. Et malgré les doutes des élèves sur une nouvelle dictature, en réponse aux erreurs de l’Histoire, tous se font manipuler sans réaliser la nature de leurs actes.
De plus, le film force le spectateur à se remettre en question car devant son écran, chacun ne comprend pas un tel engouement pour un mouvement dont l’extrémisme et la dangerosité semblent aussi évidents, mais finalement, voit que tout peut aller extrêmement vite, et de manière inconsciente. Bien que les personnages soient plutôt intéressants (le prof en premier lieu), ils restent assez classiques, voir caricaturaux : Un « gros dur » qui se repenti grâce au groupe, un élève qui réalise peu à peu la gravité de la situation, des réfractaires au mouvement, et un élève particulièrement fragile qui s’implique beaucoup trop dans le projet. Néanmoins, ce dernier personnage porte une grosse partie du film par l’impacte dévastateur que va avoir la vague sur lui, un élément qui nuance le propos: le fascisme est à bannir mais il peut tout de même avoir un impact positif sur l’individu. Les acteurs sont crédibles, la lumière assez grisée donne un aspect très froid au film, avec la blancheur des chemises, la neutralité des élèves. La musique et les plans (zooms, gros plans…) servent grandement le propos du film, mettant en parallèle la vie classique (fêtes, amours…) adolescente et la vie communautaire qu’ils adoptent, beaucoup plus stricte et disciplinée. (même des ados fêtards, cruels entre eux et égoïstes adhèrent largement à l’autorité et à l’ordre).
Enfin, malgré un très bon scénario, quelques doutes surgissent : les événements prennent une dimension énorme bien trop rapidement (une semaine), le fait que l’action se situe en Allemagne (et non aux USA comme selon les faits) et que ce projet soit soutenu semble abusif, et que l’école ne semble pas prendre en compte son l’évolution dramatique en y mettant directement un terme manque de crédibilité. Malgré tout, La Vague est un très bon film qui donne à réfléchir et qui se termine sur une image frappante : le visage de Wenger dans la voiture de police, ses traits figés dans la terreur, l’incompréhension et le désarroi.