« Ce film ne vise qu’à distraire. L’action se situe au Moyen-Orient. Les événements actuels lui donneront sans doute un relief que nous ne souhaitions pas. Notre équipe est composée des chrétiens, de juifs, de musulmans. Nous sommes des amis. Nous comptons bien le rester ». Cet avertissement, ajouté in extremis avant même que ne débute le générique du film, ne se comprend que si l’on prend la peine de resituer La Valise dans son contexte historique. Projeté en pleine Guerre du Kippour, puisque le film est sorti quelques jours après le début des hostilités, le 11 octobre 1973, la Valise est, au-delà de toute considération qualitative, un film rare car un film qu'on ne fera plus. Il suffit de se souvenir du "tollé" de The Interview (même si on est en droit de se demander où s'arrête la réalité et où commence la promo) pour se rendre compte que peu de comédies peuvent encore aujourd'hui se moquer de relations internationales compliquées, d'enjeux politico-religieux délicats, le tout en s'arrangeant pour que chacun en prenne plein son grade à valeur égale.
Car Veber n'épargne personne dans son scénario : le rapport des Juifs et de l'argent, les Arabes antisémites, les Français fainéants et syndicalistes, tout le monde y passe dans la joie et l'allégresse, au son de quelques répliques savoureuses même si rares, privilégiant la succession de malchance comme à l'âge d'or du burlesque. On sent dans le scénario la patte de Veber, indéniablement, mais on sent aussi que la sauce prend moins bien avec Lautner, plus habitué à la mécanique comique verbale d'un Audiard. Du coup, quelques moments de mou plombent un peu le film, et l'ensemble manque parfois d'un timing plus précis, plus chirurgical au niveau du montage et du cadrage, comme saura justement le faire Veber plus tard.
Il n'en demeure pas moins que La Valise se laisse agréablement regarder, que la moustache de Marielle et les bras, gros eux aussi, de Constantin remplissent à merveille leurs missions, et que le charme de Mireille Darc n'a pas diminué depuis la sortie du film. Sympatoche.