Vivianne, femme du consul de France de Melbourne, remplit le vide de son existence en collectionnant des objets exotiques. Alors qu’elle se trouve en Nouvelle-Guinée, elle fait la connaissance d’un groupe de hippies s’apprêtant à partir en expédition pour découvrir « la vallée », coin perdu dans les montagnes qui n’apparaissant pas sur les cartes car perpétuellement « obscured by clouds », c’est-à-dire recouverte de nuages. L’endroit est inexploré mais les voyageurs se promettent bien d’être les premiers en accédant à un endroit pur de toute civilisation, quasi paradisiaque. Comme Viviane est aussi à la recherche des magnifiques plumes de l’oiseau de paradis, elle se laisse tenter et se joint à leur équipée. Ils rencontreront différentes tribus mais la découverte de la nature et de la vie primitive ne sera pas sans malmener leurs idéaux. Découvrir la vallée en vaut-il vraiment la chandelle ?…
Voir et apprécier la Vallée suppose vaincre deux écueils : d’abord surmonter son agacement vis-à-vis de la voix et du jeu artificiels de Bulle Ogier. Certes, qu’elle joue une bourgeoise un peu guindée au début peut expliquer cela mais quand on arrive au milieu du film, alors qu’elle fait partie intégrante du groupe de hippies, ça devient un tantinet gonflant, surtout lorsqu’elle donne la réplique à Jean-Pierre Kalfon.
L’autre souci n’en est pas vraiment un. On peut supposer que nombre de spectateurs qui décident de se mater La Vallée le font pour vérifier l’utilisation, l’impact de la musique de leur groupe préféré, Pink Floyd (c’est la deuxième et dernière association entre Schroeder et le groupe anglais après More).
Une déception les guette car mis à part l’utilisation du titre phare (Obscured by Clouds) qui accompagne les deux génériques et donne au film une ambiance mystérieuse, un brin dangereuse, le reste se contente de glisser quelques chansons par le biais d’un poste radio déglingué ou de l’autoradio du pick-up des personnages. Rien d’exceptionnel donc, même s’il est cocasse d’entendre la voix de Gilmour chantonner Wot’s… uh the deal alors que Bulle Ogier est en train d’écarter les jambes pour laisser passer son beau hippie blond.
Non, pas trop de Pink Floyd, surtout du silence, des dialogues philosophico-spiratualistes bien dans l’air du temps, des chants de tribus ou des bruits naturels. Et finalement, ce n’est pas plus mal. Avec des stéréotypes post Woodstock à foison, le film aurait pu devenir insupportable. Au lieu de cela, Schroeder parvient à rendre intéressants ses personnages à la fois sages et naïfs, et à rendre immersive cette longue incursion au cœur des contrées les plus sauvages de la Nouvelle Guinée. Périple initiatique, le voyage du petit groupe n’est pas sans avoir des allures de conte philosophique dont le dénouement apporte une touche désenchantée (et même plus que cela) à des idéaux babacools envers lesquels Schroeder aura aussi eu le bon goût de ne pas porter une charge qui aurait pu être trop facile.