Le colonialisme, c'est maintenir quelqu'un en vie, pour boire son sang goutte à goutte


Si l'anéantissement d'une race est le dernier mot du progrès colonial, les Américains peuvent se vanter d'avoir mené leur oeuvre à bon terme.



La vengeance est un plat qui se mange froid est un western italien signé Pasquale Squitieri instable qui a la bonne idée de présenter le colonialisme américain à travers une répulsion raciale à l'encontre des Amérindiens qui ne prends aucun gant avec le spectateur autant dans la forme que le fond au point de rendre le tout dans un premier temps "visceral". Seulement, entre un humour assez malvenu, une intrigue avec des trous narratifs, une partition anecdotique de Piero Umiliani, ainsi qu'une réalisation qui bas clairement de l'aile avec des tremblements de caméra gerbatif, le film perd de son efficacité/ingéniosité pour devenir branlant, certes pas sans quelques qualités mais insuffisantes pour en faire un bon western, au mieux passable. Vu le propos ambitieux abordé, on regrette que le cinéaste se soit perdu dans la médiocrité artistique (après le petit budget n'a pas aidé) sachant qu'il ne développe pas assez profondément son intrigue en transformant le tout en un récit de vengeance somme toute conventionnel.


Les scènes d'action sont dans l'ensemble appréciable et certainement surprenant avec certains passages frappant et significatif telle la scène d’introduction avec le massacre brutal d'une famille, l'exécution impitoyable d'un Amérindien par un enfant, le lynchage sadique d'une Amérindienne brutalisée et humiliée par une foule raciste et hostile, ou encore un final qui laisse éclater toute l'aberration impérialiste. Des actions servies à travers un rythme rondement mené amplifier par une critique sociale du cinéaste qui n'épargne personne à commencer par la presse, l'oppression américaine, le comportement outrancier des Américains, le rang social, jusqu'aux magouilles politiciennes. Que des bonnes idées qui fâcheusement seront freinées par les nombreux défauts énumérés. Niveau gun fight c'est sympa mais rien qu'on est déjà vu plusieurs fois. Le duel final sans être mauvais manque d'impact vu la tension fournie, sachant que tout long du récit le cinéaste ne manque pas d'idée en matière de violences et de tortures.


Le jeu des comédiens diffèrent selon les acteurs, ainsi on passe de partitions grotesques, à expression figée et statique, pour finalement rebondir sur des performances géniales. Commençons par le génial avec les 3 antagonistes principaux qui sont excellents à commencer par Kinski, dans le rôle de Virgil Prescott, un journaliste véreux et sans pitié que le comédien incarne parfaitement. Ivan Rassimov, en tant que Perkins l'antagoniste principal est charismatique. Une véritable pourriture pour qui seul le profit compte et qui n'a aucune valeur pour la vie humaine, capable des pires bassesses pour obtenir ce qu'il veut. Il traite les humains tels des objets dont il peut se servir selon quand ça lui chante. L'homme de main de Perkins : "Boon", incarné par Teodoro Corra bien que moins impactant apporte une étincelle de maléfice avec cette gâchette qui remplit les pires contrats pour son plaisir personnel. La séquence de torture dans laquelle il se retrouve à être la victime est savoureuse.


Pour ce qui est des expressions figées et statiques j'appelle le comédien Leonard Mann qui sous les traits du héros principal : "Jim Bridger", vient un peu gâcher ce personnage au fort potentiel de par son originalité vu qu'il est un raciste et un bourreau qui va finalement se racheter une conduite. Un rôle évolutif qui malencontreusement reste platonique avec ce comédien qui n'ouvrira la bouche qu'à plus de la moitié du récit et ne fera preuve d'aucun pardon envers toutes ses victimes. Leonard Mann possède une bonne tête, seulement son incarnation est trop impassible vu le rôle qu'il incarne. Le problème venant certainement avant tout de l'écriture du personnage, car si Leonard Mann nous a habitué à prendre peu souvent la parole dans ses longs-métrages, il a déjà réussi à faire preuve de dramatisme, toutes proportions gardées car le comédien conserve une certaine froideur, comme pour son incarnation dans "Les pistoleros de l'avé Maria".


Pour le grotesque je pense en premier à "Tune", la jeune Indienne, jouée par Elizabeth Eversfield qui est problématique car si sur le papier son personnage avait du potentiel, ici il est ridiculement cliché et comme si cela ne suffisait pas, mal incarné. La comédienne est grotesque et agaçante. La dualité amoureuse que forme Elizabeth Eversfield (Tune) et Leonard Mann (Bridger) ne fonctionne pas du tout. Il n'y a aucune alchimie entre les deux comédiens, de plus, l'écriture autour de ceux-ci n'est pas logique. Leonard (Bridger) sauve Elizabeth (Tune) d'une mort humiliante sans la moindre raison sachant qu'il voue une rancoeur absolue aux Amérindiens au point des les éradiquer. J'en viens à me demander si ce ne serait pas qu'une histoire de sexe vu que le seul atout de Tune est d'être une amérindienne canon qui aime parler d'elle à la troisième personne. Triste constat, mais on ne peut qu'en arriver à cette déduction puisque Bridger n'hésite pas à se passer de Tune après avoir obtenu d'elle quelques compensations en nature, et puisqu'il ne lâche jamais un mot, ni une expression, je ne vois que cette possibilité de réponse. Vient enfin le personnage de Doc par Steffen Zacharias qui apporte du dynamisme via un rôle sympathique mais qui dérive trop rapidement dans l'exagération en voulant forcer un humour qui s'associe mal avec la violente intrigue principale. Le comique de service qui en fait trop.


CONCLUSION :


La vengeance est un plat qui se mange froid de Pasquale Squitieri est un western engagé qui aurait pu être un excellent nectar si les nombreuses faiblesses tout à fait évitables pour certaines n'avaient pas pris le pas sur le positif. Des défauts qui n'enterrent pas totalement le film puisque de bons moments sont à retenir sans toutefois parvenir à nous faire fermer les yeux sur les problématiques de l'intrigue, de certaines incarnations, jusqu'à la réalisation.


On retiendra avant tout la critique osée du cinéaste autour du colonialisme américain et des nombreuses dérives qu'il en découle.

Créée

le 7 mai 2021

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