Que serait la vie si vous n'aviez pas été sur Terre ?

Le film date de 1946, la guerre a un peu étiolé le discours de Capra, et lors de sa sortie, il ne connait pas un grand succès ; certains critiques sont élogieux, d'autres le sont moins, car le propos parait ancré dans une Amérique idéale qui n'existe plus. Mais avec le temps, le film va atteindre une nouvelle dimension et se révéler d'une beauté stupéfiante. Capra parvient à prouver qu'aucun homme n'est un raté, même le plus humble soit-il est utile aux autres, c'est ce que démontre l'ange tutélaire grâce à son intervention pour redonner confiance à George Bailey, le héros de cette histoire incarné par un James Stewart des grands jours, il lui montre son utilité et ce qui se serait passé si George n'était pas né. Capra transporte le spectateur en plein rêve, au coeur d'un conte merveilleux.
Fable morale, fable sociale, humaine, cette comédie effervescente au mélodrame assumé, déguisé en récit fantastique, possède une force d'émotion bouleversante, elle touche nos affects les plus sensibles, mais en même temps, c'est un véritable enchantement qui procure une véritable joie de vivre en célébrant la générosité et la solidarité, sans pour autant sombrer dans la niaiserie. Revoir ce film aujourd'hui, dans une période précédant les fêtes de fin d'année est encore plus émouvant (l'action ayant lieu pendant la nuit de Noël), malgré les clichés que ça envoie (mélo, nuit de Noël), mais lorsqu'un réalisateur aussi doué que Capra parvient à émouvoir et à réjouir avec une telle légèreté et une telle intensité, ces notions de clichés sont dénuées de sens. Les acteurs participent à cette perfection, James Stewart bien sûr qui est touchant, la délicieuse Donna Reed, Henry Travers en ange malicieux et bienfaiteur à la trogne de pochard réjoui, et même Lionel Barrymore dans le rôle du méchant et cupide promoteur, est excellent.
Voici un film résolument optimiste et moralisateur qui est devenu non seulement un grand classique et qui synthétise tout ce que l'univers de Capra contient de généreuse utopie et de grandeur humaniste, mais qui surtout redonne foi en l'humanité.