Le sens de la vie
Utopie, générosité, humanisme sont-ils de vains mots, ou bien représentent-ils la réalité qui donne un sens à notre vie ? Ce film en est la merveilleuse illustration, et ces valeurs y sont...
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le 25 juil. 2011
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81
Comment mettre une autre note que la maximale pour un tel film?.. Comment ne pas tomber littéralement sous le charme de cette merveille du maître Frank Capra?.. Le film de noël par-excellence, qui a traversé les années et qui continuera à les traverser, étalon et absolu de tout un genre dont la naïveté est un code à accepter (il est aussi respectable que le misérabilisme dans les films sociaux...), servi par une photographie sublime, un jeu d'acteurs impeccable (de James Stewart à Lionel Barrymore, en passant par la délicieuse Donna Reed et le maladroit et au-combien touchant Thomas Mitchell, sans parler du ventripotent et désopilant Henry Travers), une réalisation sans faille aucune, un rythme maitrisé à la perfection...
La féérie du début n'est néanmoins qu'apparente: dès la première scène nous savons que le personnage principal est sur le point de se suicider, et les deux tiers du film vont nous montrer comment cet homme si aimé, si gentil, va être amené à ce désir d'autodestruction. Ainsi l'équilibre est d'emblée l'une des caractéristiques de ce film: la comédie côtoie le drame en permanence, aucune scène optimiste ne l'est totalement, aucune scène tragique non-plus. Des exemples? la scène du bal de promo avec le plongeon collectif la piscine suivie d'un flirt à croquer entre les deux personnages principaux se termine brutalement par l'annonce du décès du père du héros... A-contrario, la scène des retrouvailles des deux tourtereaux, très dure et remplie de malaise sinon de violence, se termine en apothéose sur un baiser passionné et un mariage... Rien n'est totalement blanc ni totalement noir, le personnage principal, malgré sa gentillesse et sa bonté, se sent à l'étroit et prisonnier d'une vie médiocre à laquelle il rêverait d'échapper. Dans l'ombre, le maléfique Lionel Barrymore joue sur les doutes et les mesquineries pur assouvir son désir de pouvoir...
Ce film semble en fait sorti de l'imagination de Dickens, avec son ambiance à la fois féérique et noire, son propos qui flirte du côté du glauque, de plus en plus au fil du film...jusqu'à la fatidique journée...
A ce moment-là le film bascule totalement dans le pessimisme, enchaine les scènes dures et les voies sans issues, le personnage principal se perd corps, cœurs et biens, noël ne veut plus rien dire du tout: la vie "réelle" a gagné, James Stewart va se suicider...et c'est là qu'intervient Clarence, l'ange ventripotent porté sur la boisson qui va, par l'exemple, prouver au héros la valeur de sa vie et l'utilité de ses actions...
A-partir de là le film opère un changement que tout le monde connaît. Je ne spoilie pas beaucoup en disant qu'il bénéficie d'un happy-end: tout le monde sait ça, tout le monde l'a dit, et son efficacité est peut-être la plus connue au monde... Mais POURQUOI? La question qui m'a tarabiscoté depuis que je l'ai vu, puis revu, puis re-revu, était celle-ci: POURQUOI cette fin est-elle aussi puissante, aussi prenante, aussi euphorisante et ne perd-elle pas d'un iota sa magie après les multiples revoyures?.. Et à force d'y réfléchir, je pense que j'ai finalement compris...
Le secret de La Vie est Belle, c'est que la joie est distillée en deux temps: il y a d'abord la joie de George Bailey d'être en vie, d'exister malgré ses déboires, juste après la leçon de l'ange. Sa course enflammée à-travers la ville, ponctuée d'apostrophes joyeuses qu'il distille alentours comme autant de cris de joie, fait renaître le sourire chez le spectateur. Mais c'est un sourire empli d'amertume sinon de tristesse: le héros va être enfermé, son entreprise va couler, et le méchant aura sa victoire, acquise grâce à un vol; d'ailleurs les huissiers sont là, qui viennent le chercher devant sa femme et ses enfants: au moins a-t-il appris que sa vie n'a pas été vaine, et qu'elle était belle... Et c'est là, directement enchaîné, qu'intervient le deuxième temps: toutes les actions passées du héros, toute sa générosité, toute sa gentillesse, reviennent à lui et non-seulement le sauvent mais font de lui l'homme le plus riche de la ville, au milieu de la joie partagée par tous pour le plus merveilleux des noëls... Ce n'est pas un miracle "gratuit" venu d'une intervention divine, tout au-contraire: l'ange n'est intervenu que pour l'empêcher de commettre l'irréparable: c'est George Bailey lui-même qui a créé ce triomphe, qui a aidé des gens qui le méritaient et qui lui prouvent leur reconnaissance au moment où, précisément, il a besoin d'eux. C'est une formidable leçon d'humanisme que nous offre Frank Capra: croyez toujours en vous car quelqu'un sera toujours là pour vous aider quand vous en aurez le plus besoin. Fraternité, joie, amour et solidarité triompheront de la tristesse (bien réelle, jamais le réalisateur ne l'occulte...) de l'ordinaire et pourront soulever des montagnes et créer des miracles. Oui: LE VIE EST BELLE! Jamais film ne l'a mieux illustré, jamais l'esprit de noël ne fut mieux exalté, car c'est simple sans être niais, optimiste mais jamais béat, car c'est un chef d'oeuvre intemporel et immortel qui jamais ne pourra me lasser...
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Créée
le 5 déc. 2015
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