Tourné sous la perestroïka durant les dernières années du régime soviétique, ce film est un témoignage de son époque. Autant le dire tout de suite, le cinéma russe des années 80 n'est plus que l'ombre de ce qu'il a été à ses débuts.
Techniquement et artistiquement, c'est AFFREUX !!! Que ce soit les lumières, les cadrages, les costumes ou les décors, le manque de moyens est criant et transperce l'écran. Le cinéma russe est à l'agonie... Il ne lui reste que le scénario pour respirer encore. Et en cette période d'ouverture vers l'ouest, le réalisateur Karen Shakhnazarov va se précipiter pour faire tout ce qui n'avait jamais pu être fait avant, à savoir une autocritique du pays. Surement faut-il être russe et avoir connu les années du rideau de fer pour apprécier pleinement les nombreuses métaphores que le film comporte. Mais on saisit vite les flèches tirées par son auteur, dépeignant un pays croulant sous la bureaucratie et l'incompétence de ses dirigeants. Dès la première scène où Aleksei est bloqué à l'entrée de l'usine où il a rendez-vous parce que son nom n'est pas au registre pour avoir un laisser passer, on comprend que le scénario va être kafkaien. Et il l'est, en multipliant les situations de plus en plus absurdes, le héro va s'engluer dans cette ville de province d'où il ne semble plus pouvoir partir.
Le film comporte ainsi une belle brochette de scènes au symbolisme politique sans ambiguïté,
(Le patron de l'usine qui se voile la face et ne remarque pas que sa secrétaire travaille nue. Le procureur politique qui n'arrive pas à se suicider. L'arbre du pouvoir russe qui à pourri. La route du retour en sens interdit. Etc...)
qui nous rappelle le surréalisme et le dadaïsme d'avant guerre, ainsi que le cinéma de Bunuel.
L'oeuvre est incontestablement forte, mais le montage laisse place à trop de longueurs et d'égarements (la visite du musée, le chant dans la chambre d'hôtel) pour une continuité et un intérêt pour nous spectateur au final assez vacillant.