Dans une mise en scène très épurée, il y a d’abord ce que l’on voit ( somptueux jardin paradisiaque, la topographie de la maison et son intérieur cossu, une vie de famille ordinaire avant de comprendre plus tard qu’il s’agit de celle de Höss, un nazi) Il y a ce que l’on ne voit pas, l’abomination derrière le mur. Et ce que l’on ne peut voir, on l’entend : cris, coups de feu, bourdonnement de fond permanent, grondement assourdissant des machines de mort)
L’abjecte normalité d’un quotidien de cette famille, dans l’espace clos, d’une zone qui jouxte le camp de concentration, un « ordinaire » vécu en toute impunité. La mise en parallèle de ce deux espaces suscite le malaise. La sidération. La banalité du mal.
Nous sommes mis devant l’horreur que dénie cette famille et nous amène à ne pas fermer les yeux sur les mécanismes de déni, d’indifférence. Ce qui se passe à nos portes, à la périphérie de notre regard. Par la question du regard, dans la fixité des plans, Glazer met en parallèle la fabrication administrative de la Shoah et par le hors-champ, l’innommable de la mise en œuvre de la machine génocidaire. Il nous ramène à ce devoir de mémoire. Un devoir de mémoire plus que nécessaire, pour lutter contre l’oubli… Du déni à l’abjection, le temps se suspend dans l’effroi des sons. Quand s’ouvrent les fleurs du mal absolu, le hors-champ nous tétanise. ”