Le film de Richard Stanley me pose problème. J'ai beaucoup apprécié L'Autre Monde en cours de projection mais je suis à présent partagé sur les intentions de son réalisateur.
En effet, Stanley présente des personnes visiblement atteintes de troubles psychologiques forts (mythomanie, mégalomanie, complexe d'infériorité, faiblesse mentale...) qui expliquent de manière rationnelle leur folie et leurs visions, mais il le fait tout en adhérant (ou en faisant semblant) à leur délire : il raconte ainsi, face caméra, comment il a vécu une expérience mystique dans le château cathare de Monségur, expérience qu'il reconstitue à la fin du film dans un faux-found-footage pas très réussi.
Malgré cette adhésion - il est accompagné d'une médium américaine visiblement acquise à la cause cathare - sa mise-en-scène révèle une certaine distance voire un amusement, jamais moqueur toutefois, de ses excentriques sujets : il n'hésitera pas révéler l'absurdité de certaines situations par la répétition - le "sorcier" Uranie accroche un jouet d'enfant en guise de talisman, jouet qui tombe, Uranie raccroche, le jouet retombe, etc. - ou par le simple filmage de certaines pratiques - Uranie, encore lui, qui trace des lignes sur une carte dont il est le seul à comprendre la signification mystique, pourtant évidente à ses yeux.
L'Autre Monde ressemble à un épisode de Striptease sous LSD où le délire envahit les images via des effets woodstockesques, digne d'un clip de Jefferson Airplane. Passionnant pour son discours sur la folie, dérangeant dans l’ambiguïté de ses intentions, le film de Stanley aurait mérité sa place dans la sélection officielle, en tant que compétiteur sérieux pour le Prix Nouveau Genre (finalement donné à The Major de Yury Bykov, que je n'ai pas vu).