L'intérêt de ce Killer's Kiss ne réside vraiment pas dans son scénario qui est simplement mauvais. Pour entrer un peu dans les détails, on va dire que c'est inutilement alambiqué et que du coup ça ne passionne pas vraiment ; Kubrick aurait dû aller droit au but et raconter son histoire aussi simplement qu'efficacement.
Non, en fait, l'intérêt réside dans la mise en scène. On pourrait qualifier Killer's Kiss de film impressionniste tant l'esthétique est mise en avant au détriment de la narration. Les seuls thèmes que Kubrick se permet d'explorer sont en fait un prétexte à délivrer des compositions audacieuses.
Et oui, nous ne sommes qu'en 1955, mais Kubrick filme déjà comme aujourd'hui, alterne gros plans et plans d'ensemble avec rythme, se permet des mouvements de caméra afin de dynamiser le film, et parvient même à filmer des combats au plus près de manière très cinématographique. L'on pourra dire tout ce que l'on veut sur Kubrick, mais le bougre parvient malgré son jeune âge à plonger le spectateur dans l'action à une époque où l'on tourne encore dans des décors peints sur des cartons.
D'ailleurs l'utilisation des décors est très intéressante ; on sent bien que c'est un film de photographe qui privilégie les belles lignes de fuite à un découpage bancal.
Ce qui m'a fascinné dans ce film, c'est le rapport au corps dans lequel nous emmène Kubrick. L'une des première scènes montre en parallèle un combat de boxe et un bal dansant. Plus tard, il y a ce plan du héros qui matte l'héroïne en face à travers un miroir (si proche et pourtant si loin) et enfin, il y a le célèbre affrontement dans une usine de mannequins.
Bref, Killer's Kiss est un film qui vaut pour son esthétique avant tout. D'ailleurs c'est bien simple, pour moi qui n'aime pas Raging Bull, je préfère mille fois ce film au scénario maladroit au chef d'oeuvre de Scorsese.