Le Bel Antonio par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Antonio est un jeune sicilien issu d'une famille de classe moyenne, séduisant et sûr de lui . Il aime la compagnie des femmes qui le lui rendent bien car aucune ne semble résister à son charme. Il revient auprès de sa famille dans sa Sicile natale après avoir vainement tenté de faire une carrière de diplomate à Rome. Durant l'absence d'Antonio, Alfio, son père, a arrangé et préparé les fiançailles de son fils avec Barbara, la pure et superbe fille d'un notaire fortuné de l'endroit. Les deux tourtereaux ont vraiment tout pour s'aimer éperdument et tout irait pour le mieux si à la suite de leur mariage un problème d'importance n'allait pas compomettre leur destin. Antonio ne peut "honorer" son épouse malgré l'amour qu'il lui porte. De ce fait le mariage ne peut être consommé et le divorce est demandé. Le père d'Antonio à l'origine de cette union se trouve déshonoré. Le jeune homme qui était auparavant l'objet de toutes les convoitises de la gente féminine devient la honte de la famille et la risée de ses concitoyens. Son problème d'impuissance le met au ban de la société. Néanmoins la vie réserve parfois des surprises...


En réalisant ce film, Mauro Bolognini nous fait un descriptif très précis du comportement d'une certaine bourgeoisie sicilienne de l'époque n'hésitant pas à utiliser les mariages à des fins d'ordre financier. Il dénonce également la vision archaïque de l'Italie et en particulier des classes privilégiées au regard de l'impuissance masculine. Tout avait pourtant bien commencé car qui pouvait être plus honorable qu'un notaire, fier d'offrir sa fille au plus bel Apollon des environs, pour parfaire sa fortune et par là-même jouir d'une certaine notoriété? Pourtant dans cette haute société, tiraillée entre tradition, religion et appât du gain, la moindre "différence" surtout dans le domaine de l'intime devient scandale, un scandale pire que les arrangements financiers. On ne rêve que d'un "beau mariage" accompagné d'une belle dot, mais on exige aussi une descendance digne du rang familial. L'impuissance revêt alors l'aspect d'une maladie honteuse qui rejaillit sur la famille. Ainsi le bel Antonio et les siens vont subir les sarcasmes de leur entourage. Si les moeurs ont heureusement évolué, il n'en demeure pas moins qu'une partie non négligeable de notre société actuelle subit encore les foudres d'un certain milieu rigoriste faisant fi des différences.


Voici une oeuvre de Mauro Bolognini qui nous plonge au coeur d'une vertigineuse descente aux enfers de la manière la plus efficace qu'il soit. Il est certain que le brillant scénario imaginé par le célèbre et talentueux Paolo Pasolini n'est pas étranger à l'éclat de cette virulente diatribe dénonçant adroitement certains tabous et préjugés malheureusement toujours présents. Marcello Mastroianni tout droit sorti de "La dolce vita" nous campe avec un incroyable brio le portrait de ce Don Juan impuissant. Il exploite formidablement les étapes de la vie de ce pauvre héros passant de la magnificence à la tragédie humaine. Claudia Cardinale qui devait être l'épouse idéale mais malheureusement insatisfaite est éblouissante de beauté et de sobriété. En fait ce couple qui se désunit malgré un amour sincère et réciproque est tout simplement poignant. Quant à Pierre Brasseur, il se montre étonnant dans son costume de père miné dans un premier temps par l'orgueil puis par le déshonneur.


Voici donc un morceau de choix dans le domaine des films qu'il convient de connaître. Cette oeuvre remarquable nous laisse un goût amer, le goût de la révolte contre ceux qui au nom de principes intransigeants et dépourvus par là-même d'un minimum d' indulgence, détruisent à jamais la vie de certains êtres.


Note: 8/10

Grard-Rocher
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le 20 nov. 2014

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