Un film subtil, sensuel et touchant, à l'image de son caftan

Deuxième film de Maryam Touzani, qui revient nous parler cette fois d'homosexualité, sujet tabou. Au travers de thématiques aussi politiques que touchantes : la maladie, l'artisanat, l'émancipation. Est-ce un deuxième essai finement travaillé ou une histoire mièvre qui ne parvient pas à sublimer son sujet ?

"Le Bleu du Caftan" est un film aussi sensible et fin que le caftan qui sera confectionné, un petit bijou d'artisanat, qui transpose la création à la sensualité dans une histoire d'amour aussi déchirante que poétique, sur un fond définitivement politique. Un joli coup de cœur !

Visuellement, le film apporte la même finesse à sa réalisation que celle que le Mâalem apporte à la confection de son luxueux caftan, car la confection de ce dernier rythmera le métrage, et les différents sujets s'aligneront tels les fils dorés du caftan. Déployant la maladie de la femme, l'homosexualité refoulée du mari, les désirs inavoués, l'éclosion d'un amour...

Le métrage porte une attention particulière à sa mise en scène, permettant à l'ensemble de ses sous-textes, et laissant la sensualité se dégager de la moindre scène, d'un tissu découpé, d'un fil brodé... Car au-delà de ces scènes mettant en scène la transmission d'un art qui se meurt, c'est bien l'éclosion d'un désir interdit que la réalisatrice met en scène. Et si la pudeur du métrage est frappante, avec une émotion feutrée, la caméra pose à la fois un message politique fort dans un pays où l'homosexualité est encore un tabou, mais aussi une histoire touchante empreinte de sensualité et d'une grande pudeur, où l'amour est au centre de ce triangle amoureux.

Si la réalisation porte avec elle l'émotion et fait le parfait lien entre toutes les idées du métrage. Le récit quant à lui est bien le matériel de base et se retrouve à être d'une grande finesse !

Sur toile de fond d'un artisanat ancestral mis à mal par les méthodes modernes de production, le métrage va surtout nous plonger dans une histoire de désirs longtemps refoulés qui viennent troubler l'existence de ce couple. Nous racontant le crépuscule d'une histoire d'amour entre Malik et Mina, atteinte d'un cancer, et de la naissance d'une nouvelle avec l'apparition du jeune Youssef. Désirs, devoir, interdits que l'on ne peut plus taire... Voilà un récit riche qui s'affine au fur et à mesure.

L'histoire porte en elle une charge émotionnelle, sans porter y apposer une seule once de culpabilité. Entre le mari, Malik, troublé par la remontée de ses désirs mais étant un mari apportant un amour pur et dévoué à sa femme, et cette même épouse, consciente de la situation, mais ne s'y opposant à aucun moment... C'est en revanche de la pudeur qui s'en dégage, que ce soit dans des moments de joie ou de peine. Le tout étant porté par un trio d'acteurs impeccable, justes et émouvants dans chaque scène, où leurs dialogues touchent autant que le poids des non-dits et des regards.

En conclusion, "Le Bleu du Caftan" est un film d'une finesse indéniable ! Visuellement maîtrisé, le récit avance dans ce triangle amoureux à l'image de ce caftan, avec un ensemble de sous-intrigues qui vont venir orner le tout. On en retire donc une émotion, une poésie qui nous touche et délivre un message politique en abordant un sujet de société encore brûlant.