Peter Liechti s'inspire librement (de manière fantasmatique, seul reproche que je pourrais lui adresser) d'une nouvelle qui se base elle-même sur des faits réels : un homme décide de se suicider par inanition. Son corps, totalement momifié, est découvert dans une forêt cent jours après la date de son décès. Un petit carnet, dans lequel il a consigné le déroulement de ses journées et des pensées existentielles, est retrouvé coincé entre ses deux jambes.

Le film relate, à partir de ces notes, les deux mois qui ont été nécessaires à cet homme pour parvenir à ses fins... c'est-à-dire à sa fin ... en ayant très faim... Désolée de jouer sur les mots (un moyen pour moi d'alléger le sujet), mais les descriptions des changements physiques faites par le narrateur tout au long de sa lente mort ont été quasiment insoutenables pour moi, à tel point que j'ai failli sortir de la salle à deux ou trois reprises. C'est fou car il n'y a absolument rien de choquant dans le visuel. Il y a en effet un élément central du scénario que le réalisateur décide de ne jamais montrer (il ne sera pas dit que je ne vous laisse pas un petit effet de surprise).

Ce qui rend le film si saisissant, mais aussi extrêmement éprouvant, c'est la manière dont Liechti arrive à nous immerger dans l'univers décrit. Le spectateur ne reste pas que spectateur, il est intégré d'une certaine façon dans le film, c'est pourquoi j'ai parlé en titre d'"expérience" cinématographique.

J'ai particulièrement apprécié les questionnements du personnage sur la vie, la mort, personnage qui se dit athée, mais semble attendre un signe quelconque de l'existence d'un dieu qui le libérerait de ses doutes.

Au niveau visuel, Liechti effectue un travail très intéressant, souvent surprenant, voire décalé, bref totalement dans l'expérimental en ce qui concerne le traitement des visions du personnage.

Il faut un certain temps pour se relever de son fauteuil une fois la projection terminée car ce film est tout simplement bouleversant. On "sent" véritablement un homme s'approcher de plus en plus de la mort tandis que l'on perçoit, en parallèle dans la nature, toujours davantage des bruissements de vie.
Iphigénie
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le 8 févr. 2011

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