Le Chat du Rabbin est adapté d’une bande dessinée du même nom, dessinée et scénarisée par Joann Sfar. Cette BD raconte comment un chat qui parle tente de se convertir au judaïsme afin de pouvoir à nouveau fréquenter la fille du rabbin. Ce scenario est aussi l’occasion de traiter de la religion juive en général, et de la culture juive en Algérie au début du 20ème siècle. Joann Sfar est lui-même à moitié séfarade (une branche du judaïsme) et à moitié ashkénaze (nom donné aux juifs venant d’Europe Centrale et Orientale), d’où cette volonté d’inclure le judaïsme à son œuvre. C’est après être intervenu dans de nombreuses écoles que Joann Sfar a pris conscience de la force de son histoire, celle de "dédramatiser les histoires entre les Juifs, les Chrétiens et les Musulmans".
L’animation ne m’attirait pas de prime abord. Les affiches laissaient voir un chat bien laid, squelettique, rachitique. Des yeux verts-jaunes de malheur, le tout me donnait comme une impression des méchants chats siamois de La Belle et le Clochard avec les oreilles de Dumbo. Et bien croyez-le ou non, je l’aime bien maintenant ce chat. Quand aux autres personnages, ils ont tous un chara-design tellement différent, que ce soit le rabbin, sa fille, le peintre russe ou les personnages secondaires, qu’on dirait que chaque animateur a animé son personnage de son côté ! Le résultat donne une impression de melting pot impressionnante, et envoi un message de tolérance : tant de gens différents sont rassemblés par les mêmes croyances.
Les rues d’Alger sont typiques et sonnent vrai. Comme la café de la ville qui n’accepte pas les clients juifs, on ne peut plus nature. Les paysages de l’Afrique sont superbes. On sent le soin apporté aux décors. On visite plusieurs Afriques dans un même film, c’est authentique, et c’est dépaysant.
Les personnages sont humains jusqu’au bout des ongles, et montrent tous à un moment donné leurs limites, et du racisme. Envers une religion, un peuple, un couleur de peau… Chacun pourra se rendre compte que sa largeur d’esprit n’était pas celle qu’il croyait. Pourtant, ils embarqueront dans une jeep à travers le désert à la recherche d’une citée perdu et de l’utopie qu’elle représente : Jérusalem, la cité d’où viennent et où sont chez eux tous les juifs.
Le plus intéressant des personnages et celui du chat. Comme un enfant il découvre la parole et ses facilités, le mensonge et la tromperie. Il va jusqu’à blasphémer. Et s’il désire faire sa Bar-Mitsva c’est uniquement pour que le rabbin accepte qu’il fréquente à nouveau la belle Zlabya, symbole d’érotisme et de fantasmes. La conversion du chat au judaïsme est donc purement calculée, il n’a aucune croyance en un quelconque Dieu et se plait à remettre en cause les dogmes de la religion comme le ferait un scientifique ou un sceptique, tout simplement. S’il n’a pas toujours tort, il est irrespectueux et perd la parole. Il suit le reste de l’histoire, quasiment en spectateur. Et quand il retrouve la parole, c’est après avoir frôlé la mort et acquis la sagesse. Il grandit au long du film, du statut d’enfant à celui de sage, ou presque… Au final c’est le chat qui se montrera le plus ouvert de tous.
Le plus beau dans l’histoire, c’est que moi qui n’y connais rien en religion, j’ai commencé là à comprendre. Et à m’y intéresser aussi ! Le film entier est un appel anti-racisme, à travers la recherche d’un parent commun. D’un berceau commun. S’ils le trouvent ou pas, je vous laisse le découvrir en regardant le film. On notera aussi la référence au très controversé Tintin au Congo !
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