Le Choc des empires par cherycok
Doté du deuxième plus gros budget pour un film malaisien et énorme succès au box-office local, The Malay Chronicles : Bloodline n'en est pas pour autant un film réussi. Taillé pour le marché international de par son casting et sa facilité d'accès, cette adaptation d'une ancienne histoire de la littérature malaisienne possède bien trop de défaut pour en faire un bon film, malgré des atouts indéniables. La bande annonce laissait augurer le meilleur, ce n'est donc pas tout à fait le cas...
Et le gros point faible du film, c'est sans conteste son casting. Avec des centaines et centaines de figurants, les batailles donnent vraiment l'impression de combat de masse il faut l'avouer, mais quand au milieu de tout ça gesticulent un héros au charisme d'une moule, un prince romain tout maigrelet et une princesse chinoise qui passe son temps à courir dans tous les sens à la recherche de sa servante, cela prête parfois un peu à rire.
Parce qu'il faut l'avouer, Stephen Rahman-Hughes, qui incarne le héros, a beau avoir une musculature taillée pour ce genre de film, il n'en demeure pas moins un piètre acteur (du moins dans le film qui nous intéresse) au charisme douteux, C'est également le cas de Gavin Stenhouse, le prince romain, jeune premier au brushing impeccable, qui se voit affublé régulièrement de lignes de dialogues inconsistantes et qui fait franchement tâche dans les scènes d'action. Alors lorsque ces deux personnages principaux ont droit à une longue scène en duo, à discuter de banalité affligeante tout en se battant tel une choré de danse sur le pont d'un bateau, ça donne une scène « OMFG » (Oh My Fucking God pour ceux qui ne connaitraient pas) qui fait décrocher un large sourire alors que ce n'était pas le but.
Et ce genre de scènes ridicules, il y en a parsemé tout le long de la première heure, et ceci est accentué par la langue qu'utilisent absolument tous les protagonistes, quelle que soit leur origine, à savoir l'anglais. Un romain qui s'exprime à un chinois en anglais pour que les deux puissent comprendre, passe encore ; un malais qui parle en anglais à un romain, passe encore... Mais pourquoi les chinois parlent anglais entre eux ? Même topo pour les romains entre eux ? Déjà qu'un romain parlant anglais à cette époque là, ça ne devait pas courir les rues, mais pour les besoins du film, pourquoi pas, mais pourquoi la princesse chinoise et sa servante n'utilisent pas leur langue natale pour discuter en privé ? Le film perd beaucoup en crédibilité sur cet aspect là également, sans parler de quelques invraisemblances historiques et matérielles qu'il peut y avoir et c'est dommage car on sent bien que le réalisateur avait vraiment envie de bien faire, à commencer par les décors et les scènes d'action.
De ce côté là, mis à part quelques costumes un peu cheapos, c'est plutôt réussi. Les bateaux sont imposants, et les décors en général sont assez jolis. Les SFX, contrairement à un film comme Detective Dee de Tsui Hark (pour prendre un exemple récent), sont relativement bien incrustés et les paysages « artificiels » ne sonnent que très rarement faux en comparaison avec ceux qui sont naturels (la forêt, la cascade,...). Voir ces armadas de bateaux arriver sur les côtes fait son petit effet et on se croirait parfois en plein film de pirates.
Et ça tombe bien parce des pirates il y en a et vont participer à ce final qui est le vrai bon point du film. On va assister pendant 20 à 30 minutes à un combat épique dans lequel vont s'affronter malais, pirates, romains, chinois,... à coup de centaines d'hommes, et à l'intérieur de ça vont se dérouler plusieurs petits combats entre les protagonistes principaux du film, dont un très réussi mettant en scène notre héros en face du grand méchant pirate chauve (oui, parce que ça fait plus peur !) équipé d'un collier qui le rend insensible aux blessures. Même si tout n'est pas parfait, les chorégraphes s'en sortent plutôt pas mal avec un montage relativement bien fait et des effets de transpercement (numériques) du plus bel effet. Le sang reste discret malgré quelques giclées ci et là, ce qui contraste pas mal avec les hectolitres de sanquette qu'on remarque parfois dans ce genre de production. D'autres combats plus anecdotiques ponctuent le film mais ils n'arrivent que rarement à attirer notre attention.
En définitif, The Malay Chronicles : Bloodline est un film juste moyen, voire passable qui, s'il ne possédait pas un final des plus sympathiques, irait directement fricoter avec la poubelle. Essai raté donc pour Yusry Abdul Halim, mais on espère qu'il aura au moins eu le mérite de réveiller un peu la production locale composé essentiellement de films d'horreur bardés de fantômes aux longs cheveux et de comédies romantico-légères dont beaucoup sont allergiques.