La tragédie de Corneille qui s'inspire d'un épisode très court de la glorieuse destinée de Rodrigo Diaz de Bivar, a eu tendance à nous faire oublier que selon la légende, le Cid fut au cours de la seconde moitié du XIème siècle, le véritable libérateur et unificateur de l'Espagne face à la menace Maure. La majorité des événements évoqués dans le film sous la plume experte de Philip Yordan, s'ils sont magnifiés par la tradition chevaleresque et les impératifs de l'aventure épique, sont fondés sur des faits authentiques. Seules les dernières scènes au sujet de la mort du Cid ne sont pas rigoureusement exactes.
Le film reste fidèle avant tout à la tradition des grandes superproductions hollywoodiennes des années 60 par son déploiement important de figurants, sa mise en scène grandiose, ses séquences de bataille, la musique enveloppante de Miklos Rosza qui récupère des mélopées arabo-espagnoles dans son style bien à lui, et par son duo de stars où Charlton Heston, habitué du genre, et Sofia Loren (qu'on retrouvera peu après dans la Chute de l'Empire Romain) ont quelques belles scènes romantiques. Le reste du casting est cosmopolite puisqu'on y trouve les Italiens Raf Vallone et Massimo Serato (habitués du cinéma bis), la Française Geneviève Page, plusieurs Anglais comme Hurd Hatfield ou Michael Hordern, et Herbert Lom toujours habile dans les rôles ethniques. A signaler aussi l'excellence de la photo par Robert Krasker.
Anthony Mann qui n'était sans doute pas le plus expérimenté en matière de très grosses productions dans ce genre, parvient quand même à transmettre son humanisme par-ci par-là, et d'ailleurs, le producteur Samuel Bronston le rappellera 3 ans plus tard pour réaliser la Chute de l'Empire Romain dans un esprit très similaire. Une grande fresque historique que j'aime bien revoir de temps en temps, en tant que nostalgique de ce vieil Hollywood qui savait déployer de grands moyens pour faire rêver le spectateur