Contrairement à certains, je ne hurlerai pas au chef d'oeuvre. Un chef d'oeuvre pour moi c'est un truc totalement inimaginable avant sa création, absolument grandiose pendant sa découverte, et presque toujours aussi inimaginable après coup qu'au départ. Le chef d'oeuvre a quelques chose d'ineffable, qui vous subjugue au point de plus savoir que dire, que faire. Le chef d'oeuvre peut vous terrasser.
Dans le monde nanar, je citerai par exemple comme chef d'oeuvre Turkish star wars, Trépanator, Mad Mutilator, Eau sauvage, L'Homme Puma, Devil's story, ou encore Furious que j'ai vu très récemment. Dans ces cas là, votre système cérébrale plonge dans l'indicible et la crise de zygomatiques se confond à la crise d'épilepsie. Très clairement, pour moi Le clandestin ne rentre pas dans cette case car il n'a rien d'inimaginable ni d'indicible. Bien au contraire, il est totalement prévisible et facilement exprimable après coup, et votre crise vient sans aucun doute de vos zygomatiques, pas de vos neurones.
Il s'agit là d'un « simple » film d'horreur qui reprend sans hésitation tous les clichés et les ficelles déjà bien connus du film d'horreur en bonne et due forme. En cela, rien de nouveau sous le soleil : les lieux forment un huis clos, les protagonistes sont pour la plupart de jeunes écervelés (les mecs super branchés, les filles bien gaulées et les hommes d'affaires véreux), on y trouve au moins un personnage moins con que les autres qui s'en sortira probablement, la gentille bestiole est en fait un méchant monstre, le seul moyen de communication est détruit pour une mauvaise raison, tout le monde va y passer petit à petit, et l'attaque finale est la plus éprouvante (pour les personnages comme pour les spectateurs, mais pas pour les mêmes raisons). Bref.. du vu et revu !
Mais si Le cladestin est sympa à regarder jusqu'à en devenir vraiment très drôle, c'est justement grâce à cela ! En effet, les clichés tout à faits entendus de ce genre de cinéma ne vous donne aucune surprise certes, mais permettent néanmoins à la nullité et l'absurdité de se glisser allègrement dans leur faille. A peu près toutes leurs failles... Evidement, les équipes techniques et artistiques y sont pour beaucoup. On citera notamment les dialogues débiles, dont certaines répliques sont particulièrement gratinées, et les effets sonores et visuels qui nous régalent les sens (mention spéciale au bruiteur et au marionnettiste). La fin du film est une pépite qui croque joyeusement sous la dent et laisse trainer son arôme délicat sous le palais assez longtemps en bouche pour qu'on ne l'oublie pas de sitôt.
Donc non, Le clandestin n'est pas un chef d'oeuvre nanar, mais on doit tout de même lui reconnaître une valeur qui fait certainement de lui un grand classique pas dénué de panache. Ces défauts en font un cru agréable autant au nez qu'en bouche, qui a l'avantage d'être accessible à tous, les plus endurcis comme les simples amateurs voire même les plus jeunes novices dans le domaine. Et ça c'est un vrai plus quand vous faites une soirée nanar : vous ferez mouche à coup sûr.