Le Clandestin
4.2
Le Clandestin

Film DTV (direct-to-video) de Greydon Clark (1987)

Le clandestin est habituellement rangé dans la catégorie du nanar, ces films si maladroits et mauvais qu’ils s’apprécient pour leurs défauts. Nanarland a proposé son article dessus, tandis que leur mythique émission sur Allociné, Escale à Nanarland, s’est penchée sur la bête dès leur deuxième numéro.

Je l’avais déjà vu une fois, sans être vraiment convaincu, plus ennuyé qu’amusé. Mais c’était lors d’une soirée nanar avec des amis. « Du gras, de la bière, du nanar » à la bonne franquette, et à ce moment de la soirée il y avait probablement plus du deuxième ingrédient.

Mais l’amateur de nanar en bon cinéphile, certes un peu déviant, ne dédaigne jamais regarder un potentiel prétendant à nouveau, pour s’assurer de son opinion ou peut-être même redécouvrir le film.

Et cette fois-ci, en bon professionnel et pour rester vigilant, j’ai tourné à l’eau. Ce qui est raccord avec le scénario du film.

Oui, effectivement, Le Clandestin est bien le nanar promis, même s’il n’a pas la défaillante grandiloquence de ceux que j’apprécie le plus.

Il faut d’ailleurs saluer l’idée, présentée bien justement dans Escale à Nanarland comme un mélange entre Alien et La Croisière s’amuse. Le clandestin en question est un beau chat roux, cobaye d’un laboratoire de recherche qui s’est échappé. En lui vit une espèce de clone félin mutant en miniature mais aux appétits sanglants et aux griffes venimeuses. Oui, ce chat… a un chat dans la gorge.

Quelle idée de vouloir utiliser un félin, espèce peu reconnue pour son intérêt pour le cinéma et surtout le dressage. Mais on peut reconnaître au film qu’il utilise bien son minou, le faisant aller là ou là, le faisant cracher et griffer par des subterfuges peu recommandables peut-être mais qui fonctionnent. Quelle injustice que ce félin ne soit pas cité au générique ! Alors certes, lors d’une scène où il est pris dans les bras d’une des jeunes filles, il n’est pas vraiment coopérant. Et puisque le matou ne miaule pas sur commande, le studio a une demi-dizaine de miaulements en stock qu’il n’hésite pas à passer en boucle. Y compris et même surtout quand la caméra montre bien que le chat n’ouvre pas la gueule.

Le responsable des effets sonores n’est d’ailleurs pas vraiment regardant sur la diversité de ses bruitages, comme le montre cette vidéo.

Ce chat vivant mérite sa petite reconnaissance, car il faut bien avouer que sa doublure en peluche est assez peu ressemblante. Et que surtout son mini-moi est une bien vilaine créature montée sur un gant, tellement outrancière qu’elle en est évidemment réjouissante. La plupart de ses attaques apparaît comme forcée, exagérée, du régal pour les amateurs.

D’ailleurs le film n’hésite pas à en faire trop dans les scènes qu’il estime les plus puissantes, sans forcément avoir un bon recul sur ses intentions. Certains moments sont tellement fortement dramatisés qu’ils en deviennent drôles, à l’image du passager qui découvre qu’il se faisait grignoter les doigts de son bras engourdi sans le savoir, s’enfuit et décide de sauter à la mer en répétant « j’ai du poison dans le sang ». Ou cette fin avec la bateau, où les personnages survivants sont extatiques, tandis qu’une mauvaise maquette coule et que le film tente de faire croire qu’ils sont dans un canot à la dérive balayé par la tempête.

Malgré ses personnages écrits à l’économie et quelques scènes qui semblent manquantes (évoquées dans des dialogues), l’histoire se laisse suivre avec une curiosité certes bienveillante. Que tout ce petit monde embarque sur un bateau, le scénario a un peu de mal à nous le faire croire, entre le propriétaire du navire, l’homme d’affaires véreux Walter, ses deux complices, la capitaine du bateau, deux étudiantes un peu délurées et trois étudiants tout aussi typiques. Mais une fois la mer prise, le film propose quelques tranches de vie ensoleillées, entre flirts, petits travaux mais aussi jeux d’influences, puisque Walter est en fait poursuivi pour corruption. La vie sur le bateau s’organise, que ce soit avant ou après la découverte de ce chat tueur, accueilli avec le plus grand des sérieux.

Ce n’est pas forcément très bien joué, mais il y a malgré tout quelques acteurs qui arrivent à tirer leur épingle du jeu, tels Walter ou la capitaine. Pour les deux étudiantes, si elles sont très charmantes, très belles et que leurs corps ne seront guère trop dissimulés, leur nudité ne sera pas exhibée (hormis dans une version alternative), même si le film s’emploie parfois à jouer avec. Quel surprise de retrouver Georges Kennedy, mince il a joué dans les Police Squad tout de même, qui n’est clairement pas à son avantage ici.

En dehors de l’exubérance de certaines de ses scènes, Le Clandestin navigue sur des eaux plutôt calmes, dont on pourra apprécier le portrait un peu naïf de ses personnages sans grande profondeur mais suffisamment intéressants pour suivre leur vie et leur survie sur le bateau. On peut se demander si le film a vraiment cherché à être sérieux, il n’y a aucune angoisse possible avec son cadre ensoleillé, ses jolies filles et ses effets spéciaux délicieusement piteux. Divertissant et le plus souvent malgré lui, le film est bien un solide représentant du nanar.

SimplySmackkk
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le 19 mai 2023

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