Interminable.
Si l'intention de la réalisatrice était de nous tenir en haleine avec un film de deux heures qui semble durer trois, le pari est réussi.
Quand cela se termine-t-il ? Il est difficile d'attribuer une note positive à une œuvre pour laquelle je n'ai ressenti que du dégoût, attendant impatiemment que les crédits du film apparaissent à l'écran. Quitter la salle sans même avoir la curiosité de découvrir une scène post-générique.
Ce n'est pourtant qu'un avant-goût. Les victimes de Matzneff, ici Vanessa Springora, ont été piégées dans un récit qui s'est étalé sur des années, à une époque où l'ogre était considéré comme un génie sur les plateaux de télévision. Alors oui, le film est long et malaisant. Les mots chuchotés de Jean-Paul Rouve à l'oreille de Kim Higelin font dresser les poils, certains gestes nous font détourner le regard vers un coin de l'écran.
"Mon enfant ultime"
C’est vrai que … On ne comprend pas le point de vue de la mère, alcoolique certes, mais qu'en est-il d'autres aspects ? Je ne me souviens pas que le film nous l'ait présentée autrement. Quel est son métier ?
Peu importe, son absence de raison, sa vision de l'éducation plus que discutable, sont peut-être justement des éléments qui mettent en évidence l'inversion des rôles entre une mère-enfant et une enfant qui se voyait déjà adulte. "
-J'ai piqué tes fringues, ça fait pas trop pute ?"
Certaines critiques ont justement souligné l'absence de point de vue de Vanessa, cette voix off omniprésente de Matzneff qui se positionne donc comme le véritable narrateur de l'histoire, l'homme qui tire les ficelles. Quelles sont les véritables motivations de la victime ? Pourquoi retourner systématiquement dans l'antre du loup ? Syndrome de Stockholm ? Perte de repères ? Repères... père ? N'est-ce pas simplement un moyen de mettre en lumière les nombreuses techniques de manipulation de G.M. ? De pointer du doigt l'aveuglement général ? Alors oui, c'est agaçant, on meurt d'envie de dénoncer la crédulité de tous ces personnages, qu'ils soient victimes ou bourreaux, mais c'était une autre époque et cela s'est passé sous les yeux de tous.
Il y a évidemment un parti pris dans ce film, le même que dans le livre éponyme dont il reprend le scénario. C'est le témoignage d'une victime qui veut détruire l'image de son bourreau, trop longtemps idolâtré pour ses textes répugnants. Le jeu d'acteur (JP Rouve est bluffant), la narration, ne sont pas très divertissants à ce niveau (ce n'est pas un Scorsese) mais ces éléments servent bien le récit : on en ressort la bouche nouée, envahi par un profond sentiment de malaise et d'injustice. L’empathie fonctionne. C’est ce qu’on attends d’un film comme celui-ci.
Gabriel Matzneff a détruit là jeunesse de nombreuses personnes. Avec ce témoignage, on lui souhaite la même chose pour sa fin de vie.