Antoine Maréchal est un brave type qui vit seul dans son appartement parisien. Les vacances d'été venues, il prend ses valise, dit au revoir à sa concierge et monte dans sa 2CV toute proprette en direction de l'Italie pour un séjour de rêve. L'escapade va pourtant tourner court car, à quelques dizaine de mètres de son point de départ, une Bentley rutilante va littéralement pulvériser la pauvre Citroën.
C'est dans ces circonstances dramatiques que le malheureux vacancier fait la connaissance de Léopold Saroyan, un type pressé, arrogant, prétentieux, je-m'en-foutiste et tiré à quatre épingles. Ce personnage se présente comme directeur d'une société import-export.
Finissant par reconnaître sa responsabilité dans l'accident, et pour réparer sa faute, il offre un séjour haut de gamme à Antoine Maréchal en Italie avec retour à Bordeaux à bord d'une splendide Cadillac décapotable. L'infortuné vacancier, éberlué par tant de convenance, n'hésite pas un instant et part pour le soleil napolitain...
"Tel est pris qui croyait prendre ", voici le proverbe qui illustre le mieux le sujet de ce film. Antoine Maréchal n'est pas un aigle mais il a une arme impitoyable: le bon sens. Léopold Saroyan a, lui, la puissance que lui attribue l'argent gagné dans des affaires douteuses et la ruse. Ce voyage de rêve dans la région de Naples n'est pas un cadeau. Ce n'est pas le style de ce directeur machiavélique.
L'import- export se traduit en fait par des trafics en tous genres allant de la drogue en passant par la pierre précieuse et parmi celle-ci se trouve le "Youkounkoun" qu'il convient de ramener à Bordeaux et transférer en Amérique pour un client très fortuné. Bien sûr, le directeur grincheux et hyper stressé a du personnel pour mener à bien ses basses œuvres, des gangsters de tout poil pas commodes du tout.
Il est presque certain qu'un tel trafic ne passe pas longtemps inaperçu dans ce petit monde de trafiquants. Une autre bande aussi vile que la première avec à sa tête un dénommé Mickey et baptisé "Le Bègue" dans le milieu, entouré de types pas commodes non plus, se mêle à cette partie.
De tout cela notre Antoine Maréchal ne se doute de rien et mène grande vie à Naples. Les grands hôtels, une très jolie fille, les beaux monuments, les formidables paysages lui mettent le cœur en joie. Il peut vivre une expérience inespérée, lui qui était habitué à sa modeste petite routine.
Bien sûr, je parlais auparavant de bon sens et cette qualité risque d'être fatale à la meute de gangsters à l'affût des faits et gestes du "touriste". La chance également se range du côté d'Antoine et petit à petit, l'infâme Saroyant, l'instigateur de cette aventure, voit un à un ses plans s'effondrer comme des châteaux de cartes. Les paris sont donc ouverts pour savoir qui de Saroyan ou de Mickey récupérera l'inestimable "Youkounkoun", à moins que le bon sens et pourquoi pas la ruse d'Antoine jouent les trouble- fête car celui-ci a également des amis, certes beaucoup plus modestes, mais qui ne manquent pas pour autant d'efficacité...
Voici donc la première comédie "made in France" à bénéficier d'un budget conséquent pour un style que beaucoup de cinéphiles avaient et ont toujours tendance à négliger, à tort. Seul Philippe de Broca avec "L'Homme de Rio" un an plutôt avait commencé à donner plus d'ampleur au style.
Ici Gérard Oury ouvre donc de nouveaux horizons pour nous faire rire en se servant d'un fait réel au journaliste Jacques Angelvin lors d'un voyage aux Etats-Unis quelques années plutôt.
Puis le réalisateur eut l'idée de réunir deux immenses acteurs très populaires aux personnalités complètement opposées. A partir de là on monte un bon sujet, une mise en scène séduisante accompagnée de gags subtils et voilà... le tour est joué.
Qui ne se souvient pas de cette pauvre 2CV pulvérisée avec Maréchal tenant le volant dans ses mains et s'écriant "elle va marcher beaucoup moins bien forcément", de la scène absolument splendide d'Antoine et Saroyan se téléphonant dans leurs voitures garées côte à côte dans une station service ? Et puis il y a cette séquence absolument exceptionnelle au cours de laquelle Saroyan confie la Cadillac à un garagiste napolitain. Celui-ci va remettre à neuf le véhicule criblé de balle en effectuant un véritable ballet sous une adaptation de "La Danza" une tarentelle locale et endiablée de Rossini.
Bien d'autres scènes vont faire notre bonheur grâce à la magie de ce duo Louis de Funès - Bourvil dont la complicité est absolument hilarante et évidente. Cette osmose entre les deux acteurs appellera un autre grand moment de cinéma avec "La grande vadrouille" qui fera de Gérard Oury la "tête d'affiche" de nos réalisateurs de comédie.
Il est logique de vous rappeler que Venantino Venantini tenait le rôle du chef de la bande rival, le surnommé "Mickey" surnommé également "le bègue" et dans un tout autre registre, la très séduisante Alida Chelli dans le rôle d'une manucure aguichante envers un Antoine tout "retourné". J'aimerais signaler la participation de Robert Duranton, le célèbre catcheur qui participa aux grandes heures de son sport dans le rôle d'un athlète prenant sa douche. Tous les acteurs sont absolument enthousiasmants et se prennent au jeu de cette brillante comédie avec délectation.
Je tiens à signaler également la qualité de la bande originale signée Georges Delerue qui accompagne ce film à ravir sans oublier bien sûr Rossini.
C'est donc à mon goût l'une des toutes meilleures comédies produites par le cinéma français. Beaucoup de cinéphiles ont vu cette œuvre truffée de trouvailles.
Certains disent qu'il y a du Chaplin dans de nombreux gags, tout bien réfléchi ce n'est pas faux et c'est tout à l'honneur de Gérard Oury de s'être un peu inspiré d'un génie du septième art.
Je ne peux m'empêcher de mettre quelques liens concernant certaines scènes "croustillantes" :
http://www.dailymotion.com/video/xoxxb_le-corniaud_news
https://www.youtube.com/watch?v=rzfKlSRwDU8
Ma note: 7/10