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ATTENTION SPOILERS


Il y a un problème dans ce film qui me parait, de prime abord, insoluble : comment a-t-on pu faire tenir en 2h33 un scénario qui en demande une heure de moins ? Si j’emploie la tournure impersonnelle du « on », ce n’est pas par hasard. Il y a un (ou des) coupable(s) non identifié(s) pour le moment dans cette histoire. Si le problème vient de la réalisation (ce dont je ne suis pas certain), c’est problématique mais excusable de par les quelques qualités dont possède le film. En revanche, si le problème réside au point de départ de cette pellicule, à savoir l’écriture du scénario, alors Ben Affleck et Matt Damon ont du sang sur les mains. Je vous assure Messieurs, nous répéter trois fois la même trame, ce n’était pas la peine. Deux à la limite c’est compréhensible. Mais trois c’est redondant.


Pour ceux n’ayant pas vu le film, pour la faire courte, c’est l’histoire de deux rivaux dans la société moyenâgeuse française qui se battent pour une femme. Sauf que l’un des deux rivaux a dépassé la limite de l’acceptable


et va commettre, littéralement, un viol.


Ainsi, on suit le point de vue des trois protagonistes : celui de chacun des rivaux puis celui de la dame. Mais à partir de là, c’est déjà un non-sens. Les points de vue sont censés nous offrir trois visions différentes pour qu’à la fin nous puissions nous faire notre propre avis réfléchi. Mais dès lors que deux des trois protagonistes ont vécu la même scène tragique, alors il n’y a pas lieu de nous montrer deux fois la même scène. Bien sûr ce n’est pas exactement une répétition puisqu’il y a des détails qui changent d’un point de vue à l’autre mais, concrètement, cela revient au même. Le propos sur lequel repose le film est donc bancal. C’est donc là que l’on peut s’interroger sur la réalisation du film. En soi la démarche de faire un film cadencé selon les différentes versions n’est pas une mauvaise idée. Certains se sont déjà frotté à ce registre et même avec succès. On peut penser par exemple à Mademoiselle de Park Chan-Wook ou bien à À coûteaux tirés de Rian Johnson. Les deux offrent un scénario bien ficelé dont la réflexion permet de dévoiler une nouvelle histoire et donc d’éviter la redondance. Bien au contraire, c’est surtout un moyen de s’amuser de la connaissance de la suite par le spectateur. Comme il sait ce qu’il va se passer, il attend une seule et unique chose : découvrir la part de nouveauté dont il est ignorant. C’est ce qui le tient en haleine finalement.


Le problème du film réside donc ailleurs. Ce n’est pas tant la démarche qui est à déplorer, c’est plus l’exécution qui s’est vu fragilisée par un scénario bancal. Mon argumentaire va probablement tourner qu’autour de cet aspect parce que, derrière, il n’y a pas grand-chose à critiquer. La photographie est léchée et les scènes de combat sont très impressionnantes, voire extrêmement violentes.
Finalement, le seul souci du film, c’est de ne pas prendre son envol. J’aurais rêvé d’une final en apothéose me faisant ainsi oublier les problèmes que j’ai évoqués précédemment. J’aurais adoré recevoir une gifle avec une fin malheureuse.
Néanmoins, le sort en a voulu autrement. Les flammes qui brulaient dans mes yeux face à l’attente d’une fin mémorable se sont progressivement éteintes,


probablement parce que jonchait sur le sol le corps inanimé d’un mort qui le méritait.


Néanmoins, il me semble nécessaire d’évoquer un aspect plus sous-terrain du film mais non moins inintéressant. Le propos du film est le viol. Force est de constater que faire un film sur le sujet aujourd’hui avec toute la dimension qu’a prise le mouvement #MeToo, c’est politique, même si l’on parle d’un fait datant du Moyen-Âge. Ainsi, j’aime à croire que ce film a une volonté de donner un reflet peut-être moins abrupt et direct de la société sur ce sujet pour l’inciter à procéder à de profonds changements.


En effet, le timing de la sortie de ce film coïncide (par le plus grand des hasards, et non ce n’est pas ironique) à quelques semaines près à un débat de société sur les dépôts de plainte de viol de certaines femmes en France. Certaines femmes s’étaient vues interrogées sur le plaisir qu’elles auraient pu avoir durant leur viol. Pourtant, sur ce sujet, le film nous donne une réponse claire :



Une femme ne jouit pas lorsqu’elle est violée.



Alors pourquoi aujourd’hui, six siècles plus tard, le statut de la femme sur ce sujet n’a que très peu évolué ?


Ainsi, j’ose espérer que le débat que peut permettre ce film lui permettra de faire parler de lui et passer outre les maladresses scénaristiques dont il fait preuve. Parce que même si le film n’est pas une franche réussite, sur ce point, il est le marqueur d’une réalité encore moyenâgeuse. Ce serait finalement son dernier mais aussi son plus beau combat.

quent_bus
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le 13 oct. 2021

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quent_bus

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