Mais bordel, qu’on en finisse !


Voilà ce que je me suis dit pendant toute la dernière demi-heure du Désert des tartares, celle qui enterre le destin du lieutenant Drogo dont la patience ne fut jamais récompensée. Ces tartares qui se sont fait attendre pendant 140 très longues minutes ne se manifesteront que dans le flou d’un horizon non défini, comme pour rappeler que l’intérêt du film n’est nullement dans l’affrontement militaire, ni dans la concrétisation d’une menace, mais bel et bien dans l’état d’attente qui précède l’affrontement. Une attente tenace parce qu’elle n’est nullement caractérisée, l’ennemi invisible n’est toujours que potentiel et jamais clairement défini. Dès lors, existe-t-il ? Que prépare-t-il ? Daignera-t-il seulement engager le combat ?


Des questions intéressantes, mais casse-figure également. Comment relater de l’ennui sans le générer ? Dans le cas présent, la réponse reste posée, tant l’attente est longue, tant les dialogues s’éternisent pour ne mener nulle part sinon à la concrétisation des concepts de l’acte manqué, des coups du sort. Le lieutenant Drogo, malgré sa pugnacité, ne sera jamais destiné à être au bon endroit au bon moment pour libérer son tempérament guerrier. Le pauvre bougre est même convié à prendre le large alors qu’enfin l’objet de son attente daigne frapper aux portes de la citadelle qui l’a vidé progressivement de son énergie vitale. Si Le désert des tartares force le respect parce qu’il va au bout de ses intentions, on peut toutefois lui reprocher l’absence de tout souffle épique, de toute récompense pour celui qui attendait quelques réponses.


C’est dommage, toute la première heure du film annonçait une aventure romanesque dans un coin reculé du monde dont la beauté formelle époustouflante sert à merveille la photographie maîtrisée de Luciano Tovoli. C’est d’ailleurs bien à ce niveau que Le désert des tartares impressionne, dans l’enchaînement de ses magnifiques prises de vue qui rendraient jaloux le National Géographique. Mais pour rassasier les rustres dont je fais partie qui attendaient un peu de sang, ou tout au moins quelques phases plus dynamiques, il en fallait peut être un peu plus.

oso
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le 15 mai 2016

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