Ce film est l'un des plus remplis et énergiques conçus par Méliès. Le diable s'invite dans un lieu de culte pour corrompre des nonnes, mais déborde très vite et se contente de les terrifier. Il souille l'endroit de sa présence et celle de ses comparses, jusqu'à la contre-offensive à bases de crucifix menée par une poignée de nonnes. Une cérémonie s'organise alors et l'ange Saint-Michel, armé, vient à bout de la bête.


Avec ses trois minutes, Le Diable au couvent est long pour son époque et proche du maximum alors recensé de Méliès (3min30 pour La Lune à un mètre en 1898). La séance est particulièrement agitée, les figurants se comptent par dizaine, les effets sont variés (avec une once de pyrotechnie et plusieurs exploitations du monte-charge ou d'un assimilé) et perfectionnés – à 'l'avant-garde' pour l'époque. Le cadre est toujours élémentaire, plan fixe et moyen, mais la narration linéaire est dopée par la grande quantité d'actions et de retournements et surtout Méliès semble pratiquer l'ellipse.


L'arrêt-caméra est utilisé avec une intensité rare même chez Méliès dont c'est le 'produit' de référence : il sert à des transformations et apparitions constantes, aussi à des basculements fréquents, où le Diable lance une nouvelle horreur ou se fait soudain déborder. De plus, le papier peint frontal (paysages d'abbaye) et celui du plafond donnent une illusion de profondeur de champ, alors que Méliès, concentré sur les trucages, forgé par une culture théâtrale et consacré à l'import des trucs d'illusionnistes, est peu concerné par ce genre d'astuces (que l'école de Brighton menée par George A.Smith est en train de développer).


Enfin le film est remarquable par sa profusion 'gratuite' et la qualité graphique de toutes ces ressources, en terme de personnes ou effigies (diablotins sortis d'un chaudron puis d'une gueule d'enfer, statues de Belzébuth, crapaud géant), de gadgets (la baguette, les bâtons et instruments) et même de costumes (une tenue du XVIe pour le Diable en plus de sa principale avec la cape noire). Ce film fantasque, proche de la comédie et du grotesque, fait partie de la préhistoire de l'Horreur au cinéma. Au sein de l’œuvre de Méliès, Il s'inscrit dans le sillage de deux films projetés en 1896 : Le Cauchemar (sombre fantaisie onirique) et surtout Le Manoir du diable en 1896, un des pionniers 'francs' dans le domaine de l'Horreur (le point de départ si on omet Execution of Mary), versant totalement dans le fantastique.


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le 26 sept. 2016

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