Le Faucon
3.7
Le Faucon

Film de Paul Boujenah (1983)

Le Faucon entre instantanément dans mon panthéon des nanars français. On est ici face à une catastrophe industrielle de grande ampleur, sublimé par une équipe qui a pourtant eu, du moins pour certains, une carrière tout à fait respectable par ailleurs. Tour d'horizon de nos suspects.


Rendons à César celui qui n'en n'a aucun, Francis Huster est Frank Zodiac. Inspecteur de police tendance hard boiled, ce qui se résume concrètement à être désagréable, voire violent, avec tous les gens qu'il croise, innocents comme suspects. Notre cher Francis est en roue libre, avec un jeu d'acteur inspiré des grands flics du cinéma américains (à la Dirty Harry) mais qui ressemble concrètement plus aux crises d'un adolescent en manque de reconnaissance. Avec des répliques dignes d'Audiard (« je suis un fou moi, moi j't'éclate ! », « enculé va, tu sais que t'es un enculé ? ») en prime. S'ajoute là-dessus une façon assez drôlatique de courir (dommage quand la moitié du film est une course-poursuite à pied). Bref, on ne prend jamais ce flic torturé au sérieux en dépit de son passé tragique.


Le méchant de notre histoire est incarné par Guy Pannequin, inconnu au bataillon mais qui ressemble à s'y méprendre à la fusion entre Alan Rickman et Gilles Lelouche avec une perruque. C'est, au fond, le moins pire du lot. Son personnage, le braqueur Gus Sabor, est un cabotin vraiment vilain mais plutôt drôle à bon escient. Il faut dire aussi qu'il ne parle quasiment pas du film, ce qui lui épargne les répliques éclatées de ses camarades de jeu.


On trouve ensuite un casting de second couteaux pas piqué de vers : Vincent Lindon joue un inspecteur junior complètement à la masse, Isabelle Nanty passe faire coucou le temps d'une scène comme animatrice radio, Agnès Jaoui a une fulgurance de 30 secondes dans un tailleur bleu pétant, bref, du beau monde. Le réalisateur, Paul Boujenah, en profite aussi pour caser les copains : Michel et Joseph Boujenah font une petite appartition et les copains Alain et Hubert Attal signent le scénario. Le problème principal est que les dialogues n'ont aucun sens. Difficile d'apprécier à sa juste valeur les tremolo de colère de Jaoui quand on ne comprend absolument pas quel est le rapport entre son personnage et Zodiac. Bon, on l'aura compris, ça fait de son mieux mais globalement ça part dans tous les sens.


Est-ce que ça se rattrapage du côté de la réalisation ? Oui… mais non. Ce n'est pas Paul Boujenah (assisté par Philippe Guez) est mauvais techniquement, c'est surtout que le montage passe à côté du scénario. Le Faucon réussit le tour de force d'être à la fois trop long et trop court ! Trop long à cause d'innombrables scènes (à commencer par le générique du début) qui durent une éternité, pour que l'on ressente vraiment la peine de Francis Huster quand il mange son hambourger. Mais aussi trop court : il manque des scènes de transition indispensables pour clarifier l'avancée du scénario. Concrètement, il faut s'imaginer que Zodiac donne en permanence l'impression de errer au hasard dans Paris et tombe par miracle sur Sabor toutes les dix minutes. S'ajoute à ça une musique désastreuse (du jazz, tout le temps, quel que soit le ton de la scène) qui donne envie de se faire sauter le caisson.


Du grand nanar, si jamais vous cherchez à comprendre pourquoi le film policier à la française a disparu au milieu des années 80.

Altay
1
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Nuit Nanarland 6

Créée

le 2 oct. 2022

Critique lue 39 fois

1 j'aime

Altay

Écrit par

Critique lue 39 fois

1

D'autres avis sur Le Faucon

Le Faucon
Marsellus_Wallace
2

Un vrai film !

Après la nuit Narnarland 2022, il m'a fallu un peu de temps pour me remettre le cerveau d'équerre.Je ne sais trop quoi en dire tellement tout est aux fraises dans ce film : - Le générique de début...

le 3 oct. 2022

2 j'aime

Le Faucon
RENGER
1

Des choix scénaristiques douteux, des interprétations à la ramasse & un Francis Huster neurasthéniqu

Frank Zodiak était un super flic, celui que l’on surnommait "Le Faucon" n’est plus que l’ombre de lui-même suite au décès de sa femme dans un terrible accident de voiture où sa petite en a réchappé...

le 15 oct. 2022

2 j'aime

Le Faucon
BastienMarie
1

A bout de souffle pour de vrai

Réalisé par Paul Boujenah (frère de) réussissant l'exploit de faire de son seul polar son film le plus drôle, avec un Francis Huster fiévreux, tout en regard dans le vide, qui reprend à sa manière...

le 23 août 2019

2 j'aime

Du même critique

Euro Truck Simulator 2
Altay
9

Inexplicable

Je ne comprends pas comment j'ai pu accrocher à Euro Truck Simulator 2 à ce point. Certes, c'est une simulation de gestion d'entreprise de transport routier (et de conduite de 35t, donc) tout à fait...

le 22 juin 2014

8 j'aime

La Jeunesse de Picsou
Altay
10

Don Rosa > Carl Barks

J'adore Carl Barks. Pour avoir créé Picsou, entre autres. Pour être honnête, je n'aime pas Mickey. Trop propre sur lui, Mickey est M. Parfait. Alors que Donald, il est humain. Enfin, non, c'est un...

le 8 juil. 2012

7 j'aime

2

Twisted Pair
Altay
1

Au-delà du réel

Difficile de réaliser une critique de Twisted Pair comme un artefact de cinéma clasique. Neil Breen, le scénariste, réalisateur, monteur, metteur en scène et interprète du rôle principal, n'est pas...

le 22 sept. 2019

6 j'aime

3