Pour un plus grand confort de lecture je vous conseille de plutôt vous rendre ici ici
2015 avait été assez décevant en terme de cinéma d’animation : à part le génial Vice Versa, peu de bons films sont sortis. Cependant il semblerait que 2016 s’annonce merveilleusement bien. Comment ne pas être optimiste à la sortie du Garçon et la Bête ?
Le film raconte l’histoire de Ren, un enfant ayant décidé de fuguer. Lors de cette fugue, Ren se retrouve dans un monde parallèle : celui des Bêtes. Là-bas il devient le disciple d’un ours champion de kendô. Le scénario s’attache ensuite à suivre la quête initiatique du jeune garçon et sa rentrée dans l’âge adulte.
Pour rentrer dans le vif du sujet et répondre au fameux « mais c’est un bon film au final ? », la réponse est qu’il l’est tellement que c’est assez dur de lui trouver des défauts. Sans tomber dans admiration aveugle de la culture japonaise et de ses films, j’ai trouvé dans celui-ci tous les ingrédients d’un film d’animation réussi : une utilisation du dessin maîtrisée, une psychologie des personnages développée, une touche d’onirisme, une intensité émotionnelle forte et l’écho si particulier que peut avoir l’animation dans nos vies.
L’histoire est superbe. Lors de la projection la salle de cinéma n’était composée que d’un seul enfant, ce qui était assez surprenant et, à plusieurs reprises, s’est posée la question « mais à qui est destiné ce film ? ». Son universalité est assez surprenante, les thèmes sont variés et rappellent ceux de Miyazaki. On y retrouve cette frontière floue et étroite entre le monde humain civilisé et le sauvage chère à Miyazaki. Le passage de Ren dans le monde des Bêtes n’est pas sans rappeler celui de Chihiro dans celui de Yababa par exemple. Mais le long métrage traite également de question comme l’identité, l’adolescence et le besoin de repère, le bien et le mal, la quête de la sagesse ou encore de l’importance de l’amour. Sans jamais tomber dans le pathos ou la mièvrerie, le film s’avère riche en pistes de réflexions et ce, grâce à de nombreux rebondissements souvent assez inattendus.
Mamoru Hosoda semble s’adresser directement au spectateur lorsqu’un personnage dit que la force est de faire de l’illusion une réalité. En effet ce conte moderne tient un discours plein de vérités. Le quartier de Tokyo ultra moderne Shibuya dessiné à l’identique à l’enseigne près nous plonge dans un réalisme avec lequel s’amuse le réalisateur nippon en brouillant les pistes : au final quel monde est le plus humain ? Celui des humains rempli de gens ne regardant que leur portable ou celui des bêtes basé sur l’entraide ? Et même au sein de ce monde est-il plus égoïste de favoriser l’apprentissage de nombreux disciples ou de ses enfants ?
Au final le talentueux réalisateur reprend le meilleur de ses précédents films : la réflexion sur la famille des Enfants loups, Ame et Yuki, celle sur la technologie, les relations qui en découlent et sur les deux mondes opposés et reliés de Summer Wars et l’esthétique léger de La traversée du temps.
La durée de l’histoire permet d’enrichir la psychologie des personnages en les suivants d’événements en événements. A travers le prisme de l’enfance et de son évolution Mamoru Hosoda réussit à faire passer bien des émotions. Ces sentiments sont également découplés grâce à des graphismes réussis : plus soignés que Dragon Ball Super et plus fluides que la majorité des Ghibli. De la même façon, la bande son se met également au service de la poésie du film, évitant le côté mélo, elle épouse cependant chaque scène.
Les seuls défauts qui me viennent en tête sont des scènes qui auraient eu pu être un peu allongées. Le film dure 2h (que l’on ne sent absolument pas passer), une petite demi-heure supplémentaire n’aurait pas été gênante. Finalement c’est assez peu de points négatifs quand on voit toutes les qualités de ce film.
On ressort de la salle ému, persuadé d’avoir appris sur soi au travers des nombreuses figures.
En 2013 Miyazaki annonçait son départ à la retraite. Alors que cette décision est apparue comme la fin de l’onirisme japonais au cinéma, ce film nous rappelle que le vieux maitre n’est pas le seul à maitriser cette animation délicate et poétique. Le film risque d’être compliqué à chasser du top 3 des films de l’année.