J'attendais rien du film. J'y suis allé comme on va voir une grand mère et qu'on se dit "profites-en bien ça sera ptet la dernière fois."
La diffusion des films japonais en France est tellement chaotique, qu'en voyant le samedi qu'aucune salle ne programmait le film à Rennes la semaine de sa sortie, en dehors d'Avant Première, j'ai un peu paniqué. Je me suis souvenu du film Kaguya-Sama programmé en catimini à la St Valentin. Je me suis dit que c'était peut-être la dernière fois que j'irais voir un Miyazaki en salle lors de sa sortie, j'ai fait "ho et puis merde" et on est allé à l'avant première. (Au final, y avait pas besoin de tant se presser.)
Au passage, ça n'est pas un Miyazaki "pour enfant". Sans aller jusqu'à dire que ça s'approche du "film d'horreur" comme je l'ai lu dans une critique, le film est compliqué à suivre et possède des thématiques adultes. Après, le film est pas non plus le summum de la violence (si vous avez vu Princesse Mononoké, ça devrait passer.)
Ce qui fait que je suis allé voir le film avec un état d'esprit particulier : être là pour profiter d'un réalisateur dont j'ai aimé le travail et profiter de chaque seconde de spectacle qu'il m'apporte. Et dès le départ je me suis pris une petite claque avec une séquence de course à travers une ville en feu (qui rappelle une séquence du film de Takahata Conte de la Princesse Kaguya.)
Ce qui fait que je n'ai pas été réfractaire à la première partie qui, il faut l'avouer, est plus lente et contemplative : Le garçon arrive dans une nouvelle maison au milieu des collines Ghibli. Il pose ses affaires. Il rencontre des mamies (on est dans Miyazaki, y a des mamies.) Il essaye de sympathiser avec la nouvelle épouse de son père. Ok, c'était pas follement passionnant, mais tout du long, je me suis juste dit "je sais pas où ça va mais les arrières plans sont superbes et niveau animation, c'est tout lui."
Tout au long de cette première partie, le film bascule de temps à autre dans le fantastique et ce merveilleux apparait comme un rêve fiévreux qui se mêle par petites touches au film. (A l'image de cette scène où le personnage émerge de l'eau pour se réveiller sur son lit.) Même s'il y a un passage très structuré entre le monde réel et le merveilleux, dans plusieurs scènes on ne sait plus trop où l'on est y compris lorsqu'on a basculé de l'autre côté.
Miyazaki fait un film volontairement flou où pas mal d'éléments sont inexpliqués et qui est désorientant. Pour le coup, je pense que pas mal de gens vont détester cet aspect (j'ai déjà lu que c'était une "bouillie incompréhensible") mais ça ne m'a pas gêné outre mesure.
Sans parler de révélations qui sont parfois balancées comme des évidences à la fin du film. Notamment sur la mère de l'enfant. Il s'embarasse même plus à créer un setting.
J'ai été scotché par le film, par les fantasmagories, les plans avec de la foule et ces personnages qui fourmillent, les bizarreries, les moments poétiques. Bref, tout ce que Miyazak' aime bien faire (on est là pour ça après tout) et je comprends que ça ai pris des années à animer.
Il y a des gens qui veulent voir dans ce film une sorte de "film testament" (mais on avait déjà dit ça de Le Vent se lève) et qui recherchent des plans ou des clins d'oeil à ses autres films. C'est peut-être effectivement des clins d'oeil. Ou c'est peut-être que Miyazaki aime bien certains "tropes" et qu'il se fait plaisir à les réutiliser.
Entre autre :
les gens qui courent a 4 pattes sur les escaliers, les esprits transparent, les petits être tout blanc, les gens qui se jettent dans les bras les uns des autres, les grands mères. Je pourrais continer longtemps.
Et moi à l'inverse, j'ai l'impression que le film tente de dire au contraire qu'il n'y a pas vraiment de testament à trouver à travers ce film.
Shueisha64 sur Mastodon me faisait remarquer qu'il y avait 13 pierres et que celles-ci pourraient correspondre à 13 oeuvres de Miyazaki. Sauf que le personnage arrive de moins en moins à faire tenir ces pices droites pour faire tenir l'ensemble (et si quelqu'un d'autre s'en occupe, ça se casse la gueule.) Un peu comme des gens qui chercheraient justement a créer une cohérence entre tous les films de Miyazaki, ce qui n'a pas vraiment de sens vu que chacun est unique ?
Ce qui m'amuse c'est aussi que le fameux grand-oncle dit "seule une personne de mon sens pourra reprendre mon oeuvre" : quand on sait les tensions orageuse entre Miyazaki père et son fils Goro, j'ai pas pu m'empêcher de pouffer de rire.
J'ai beaucoup aimé ce film,mais j'étais dans un très bon état d'esprit (et dans une très bonne salle) et ça a sans doute joué dans mon appréciation d'un film que certain trouveront brouillon, trop lent, trop évident. D'autres trouveront que Miyazaki se répètent peut-être. Moi j'ai vu suffisamment de films qui tentaient de le singer ces dix dernières années pour apprécier pleinement à quel point sa patte est évidente et inimitable.
PS : Pendant des mois je ne comprenais pas l'affiche du film, le héron semblant avoir une protubérance bizarre au niveau du bec que je croyais être un oeil. Après avoir vu le film je comprends mieux.