Les gamins en folies
Alors qu'un cow-boy, William "Billy the Kid" Bonney semble errer dans le désert, c'est à ce moment-là qu'il rencontre un éleveur anglais qui va lui proposer un boulot et le traiter comme son égal...
le 19 févr. 2015
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Le Gaucher est une sorte d'anti-western, une étude presque psychanalytique du personnage de William Bonney dit Billy the Kid ; au diable l'épopée et l'imagerie du Far West triomphant, le Billy d'Arthur Penn n'a rien de glorieux, c'est un anti-héros, un petit morveux impulsif, immature, fruste et mal dégrossi qui se transforme en justicier, mais dont la stature n'est pas à la mesure de sa légende. C'est un être en proie à des pulsions qu'il ne comprend pas. Il va dégringoler, dépassé par les événements, incapable d'assumer un destin trop grand pour lui.
Autant dire que l'ambiguïté de ce personnage donnée par Penn, avec cette homosexualité latente entre Billy et Pat Garrett, cette représentation loin des canons du genre, sera rejetée à la fois par le public et la critique américaine. Le film sera un échec, alors qu'aujourd'hui, il est considéré comme un classique. C'est parce qu'il s'inscrit dans une période où le western subit une profonde mutation, avec des films comme 3h10 pour Yuma, Du sang dans le désert ou L'Homme aux colts d'or... qui témoignent tous d'une volonté hollywoodienne de revisiter le vieux Far West de l'âge d'or.
Penn ajoute une dimension psychologique au personnage de Billy qui n'est plus le héros mythique tel que l'ont interprété Robert Taylor ou Audie Murphy entre autres, concrétisant ainsi certaines tendances du sur-western. Et le jeu de Paul Newman renforce cette dimension en passant sans transition d'un jeu très intériorisé de type Actor's Studio à un réalisme brutal. Il est clair que le public américain ne goûta guère la façon dont Penn avait fait de Billy un personnage plus proche des héros de Tennessee Williams que de ceux du western classique, et ainsi terni l'image virile d'un bandit légendaire qui au passage n'a jamais été gaucher (le malentendu vient de l'inversion d'une photo), c'est la critique européenne qui encensa l'audace de ce film.
En contrepartie, Penn a fortement humanisé les 2 personnages principaux de Billy et de Garrett ; John Dehner connu comme un très bon second rôle, donne de son personnage une vision très sobre et mesurée, si bien que ces 2 protagonistes ne paraissent jamais antipathiques. Dans la dernière scène, Penn réévalue aussi la mort de Billy, vue comme un suicide plus ou moins travesti, une sorte d'auto-punition, alors que pour Garrett c'est un meurtre involontaire car il ne tire que parce qu'il se sentait menacé. La violence est désespérée et sans fioritures, prouvant que Penn sera le futur réalisateur de Little Big Man. En tout cas, pour son premier film, le réalisateur qui venait de la télé, frappait un grand coup, et permettait à Paul Newman d'endosser un de ses premiers grands rôles, alors que ce rôle avait au départ été prévu pour James Dean.
C'est donc une étape importante de l'histoire du western et de la façon dont l'industrie hollywoodienne a peu à peu évolué dans son illustration de plus en plus critique d'un Far West légendaire. Et ça s'amplifiera dans les années 70, d'ailleurs Sam Peckinpah donnera une version totalement revisitée et crépusculaire dans Pat Garrett et Billy le Kid en 1973.
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Créée
le 3 oct. 2018
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