J’avais une vision des terres du milieu héritée d’une trilogie apparemment déjà terriblement désuète. Issue d’une époque lointaine, donc, puisqu’on y filmait encore les décors du pays dans lequel on se rendait pour en capturer les paysages spécifiques (comprenez : pour les filmer), cette trilogie qui se voulait fédératrice malgré les concessions avait au moins le mérite de la cohérence.
Quant à diviser un conte pour enfants de moins de 500 pages (en V.O) en trois parties, exercice sinon cynique en tout cas forcément casse gueule, tous les connaisseurs vous le demanderont : mais quel est le fuck ?
Alors on tire par ci, on tire par là.
ON RAJOUTE UNE ROMANCE DE M…
Et on compte sur l’indulgence générale en faisant passer ça avec une excuse du genre « mais en fait c’est plus qu’une adaptation du Hobbit, c’est une introduction du Seigneur des anneaux », et aussi avec un peu de beurre et de la crème hydratante tu te l’introduis bien l’Hobbit dans l’anneau.
Alors voilà, c’est au terme d’un terne voyage retour sur les terres du Milieu que je dresse le bilan suivant :
Je suis un pauvre con.
Oui. Je me rends maintenant compte qu’avoir donné un 6 au premier volet de la trilogie qui nous intéresse ici n’était motivé que par une nostalgie finalement condamnable. Deux films plus tard, le même constat vésalgique. Toujours ce procédé HFR (Hautement Falsifié Rendu) qui te fait exploser l’artificialité du médium en pleine poire alors que tu viens pour échapper à ton 21ème siècle moribond, toujours cette 3D dispensable mais surtaxée, et toute cette bouillie numérique dont la signature visuelle donne l’impression de jouer à WOW dans son salon.
Rendez nous les masques d’Orques en caoutchouc de 2001. Toujours mieux qu’une guerre des clones d’elfes à tronches de chinois du FBI blonds (véridique et constaté visuellement).
Pas un mot de l’histoire, sinon que l’entreprise est bancale et qu’elle sent un peu ce parfum puant qui n’a pas d’odeur.
Faire monter la sauce pendant un film (que j’ai lui aussi surnoté, et pour cause !) sur le dos d’un dragon qui ne tient pas plus qu’un boss de premier niveau au début du film suivant, voilà qui me donne envie de revoir ma notation précédente, en tout cas dans sa version salle.
Finalement, à la lueur d’un troisième et dernier volet, c’est presque un procès d’intention que j’ai envie de dresser aujourd’hui .
Peter ! Pan !
Salaud.
Heureusement, même si la réalisation de Jackson s’apparente de plus en plus à ce que produirait l’impression de voir un téléfilm financé par les émirats arabes un jour de donation à l’aveugle, on a plaisir à revoir Freeman (Martin) camper un fort sympathique Bilbo, à qui cette trilogie doit décidemment (ou heureusement) beaucoup.
Les clins d’œil de McKellen rappellent aussi les bons moments du passé et Blanchett est loin de faire pâle figure au milieu d’une scène se voulant aussi prophétique qu’elle se montre anecdotique. Legolas m’épatera toujours avec sa propension à utiliser les éléments du décor pour corriger avec distinction tout ce qui se dresse sur son chemin. Best video game character ever.
Un peu l’équivalent en jeu de plateforme de ce qu’est l’agent Smith en beat them all.
De bons moments oui, mais le tout s’inscrit dans une structure aussi bancale que l’ensemble de l’adaptation. Il en résulte donc un résultat inégal et dosé avec une parcimonie difficilement décelable en l’état actuel du montage. On verra d’acheter la version définitive 9 disques blu ray collector metal box ultimate à 130 euros pour savourer les finesses cachées des intentions du réalisateur. Bien sûr.
Quitte à passer pour un vieux réac, plus que les entorses au matériau d’origine que beaucoup regrettent, c’est cette lente mais inéluctable métamorphose du cinéma fantasy qui gagne en surenchère visuelle ce qu’il perd en pouvoir évocateur qui me donne envie d’emprunter à Smaug un peu de sa désolation.