Alors moi je viens avec des combats contre des orques, une romance impossible, la trahison d'un père
[fin du titre]... et même un dragon !
- Ah carrément, un dragon !
- Sensationnel garanti ![/fin du titre]
Hélas, cent fois hélas ! Peter Jackson, cesse de me décevoir, de grâce ! De ta trilogie du Seigneur des Anneaux tutoyant la perfection, tu étais déjà passé à un Voyage Inattendu doté d’éminentes qualités mais aussi de nombreux défauts. Et cette fois-ci, tu nous sers une Désolation de Smaug avec encore plus de défauts, et surtout beaucoup moins de qualités ! Mais jusqu’où cela s’arrêtera-t-il, bon sang de bois ? Vas-tu faire du troisième larron un étron que l’on n’osera plus nommer qu’avec honte et dérision des années après sa sortie ? Par pitié, ressaisis-toi ! C’est parce que je t’aime beaucoup que je me dois de te le dire avant que tu ne commettes l’irréparable.
Il est vrai que j’ai hélas dû visionner ce deuxième opus de ton Hobbit en Version Française et que celle-ci était très très moyenne, contrairement à celle du Seigneur des Anneaux. Il me suffira d’évoquer le « I have the only right » devenant un infâme « Tout m’en donne le droit » pour illustrer mon désarroi, car l’importance des mots utilisés et de la musique de la langue est véritablement fondamentale dans l’univers de Tolkien. Dans le même registre, la platitude du doubleur de Bilbon me fait pleurer le jeu sublime de Martin Freeman.
Bref, cela partait mal.
Mais même avec cela, Peter, tu aurais pu éviter de boursoufler ton film d’autant de furoncles. Que de phrases creuses, mon Dieu, que de phrases creuses (« il s’appelle Bilbon », « c’est notre combat », « je suis la mort » : MERCI HOLLYWOOD) ! Que de personnages caricaturaux ou diaphanes (mention spéciale aux trois Elfes qui ont perdu toute leur hauteur d’Eldar pour devenir des humains quelconques, avec des longs cheveux, des arcs et de l’orgueil à revendre) ! Que de mauvais rythme dans le scénario ! Alors que tu as l’habitude de prendre ton temps (ce que j’apprécie) pour poser ton film et ses développements, tu nous as cette fois-ci expédié fissa trois ou quatre épisodes importants (Beorn, Forêt Noire, Thranduil, sans parler de Gandalf à Dol Guldur). Je te le dis, ton film m’a diaboliquement déçu durant sa première moitié. Jusqu’à l’arrivée de Barde, en vérité.
Car Barde est un bon personnage, et il est bien interprété. Il a du relief et j’espère qu’il magnifiera le troisième opus, après avoir déjà redressé quelque peu celui-ci qui partait à la dérive. Esgaroth m’a plutôt plu, de même. Et Smaug dans sa Montagne était à la fois intéressant et beau esthétiquement (ce qui m’a d’ailleurs fait penser que les équipes pour les effets visuels s’étaient surtout concentrées sur lui au détriment du reste).
En revanche, Tauriel, tu aurais pu t’en passer. Sous-Arwen, sans la grâce. Espèce d’avatar féministe bidon qui jure pas mal dans le contexte, même si je dois reconnaître que c’était un peu moins catastrophique que ce que j’appréhendais (à moins que je ne sois blasé, en fait, et que la lassitude l’emporte dorénavant sur la fureur…). Idem des romances à deux baht. ARRETEZ DE FABRIQUER DU SENTIMENT ARTIFICIEL. Pardon, c’était un cri du cœur. J’ai eu une telle sensation d’assister à une production purement commerciale que ça me rend triste et enragé.
J’ai eu l’impression de voir une sorte de jeu vidéo, dont les graphismes vieilliront avec le temps, et dont le gameplay est d’une pauvreté telle qu’il ne survivra pas à la postérité. Cent fois hélas ! Tu as brodé sur le texte de Tolkien sans atteindre sa hauteur et tu as embaumé le tout dans tes effets visuels pasteurisés. Parce que, disons-le, tout ça fait quand même bien esthétiquement aseptisé. Pas spécialement beau, en plus, à deux ou trois petites exceptions. Sans compter que malheureusement, la bande originale de Howard Shore est anonyme... Alors que c'était évidemment une des composantes merveilleuses du Seigneur des Anneaux et que pour le Voyage Inattendu Shore avait composé un thème magnifique. Donc j’enrage.
Je sais bien que ton film a des qualités (Smaug, Barde, l’humour, quelques beaux plans), et qu’en définitive, si on fait abstraction de tous les défauts que j’ai pointés, j’ai passé un assez bon moment dans la salle de cinéma, ce qui justifie mon 6. Mais ce 6 aurait pu être un 7 fallacieux si je m’étais aveuglé sur la réelle qualité intrinsèque de ta réalisation et avais seulement obéi à mon cœur amoureux de la Terre du Milieu.
Alors pour le bien de la fin de cette nouvelle trilogie, je t’en conjure, Peter, rectifie le tir !