Je publie ce texte d'Eric Maurel extrait de la critique complète consultable ensuivant le lien suivant:


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A la lecture du sujet, on se doute bien que le squelette de l’intrigue est tout à fait conventionnel ; mais ce sont les détails qui sont originaux et font toute la différence avec le tout-venant du western de série. Même si l’ensemble est loin d’être inoubliable, le scénario regorge d’assez de séquences insolites, cocasses ou inédites pour nous tenir en éveil tout du long. Le ton du film s’avère lui aussi assez inhabituel déjà par le fait de son arrière-fond musical signé par Rex Dunn, compositeur qui nous donne ici son unique musique pour un long métrage de fiction. Très éloignée des canons coutumiers du genre, sa partition n’en est pas moins très réussie, tour à tour légère ou mélodramatique, non dénuée de romantisme, faisant même à quelques reprises penser à celles écrites pour les films de Yasujiro Ozu à la même époque ! C’est dire le sentiment d’anachronisme et d’exotisme qu’elle apporte à ce western ; pour le meilleur, car malgré le fait qu'elle puisse paraître incongrue, elle s'avère finalement tout à fait bien adaptée au ton et aux images ! Selander et son scénariste Blake Edwards prennent leur temps et semblent avoir voulu donner une patine douce et nonchalante à leur premier travail en commun ; le deuxième scénario du futur réalisateur de La Panthère rose et de The Party sera à nouveau destiné à un western de Lesley Selander, celui qu’il a fourni ici pour Panhandle ayant été son premier travail d’écriture pour le cinéma. Non content d’avoir scénarisé le film, Blake Edwards le coproduira également et tiendra l'un des rôles principaux en la personne de l’inquiétant bras droit du "chef des méchants". Et il faut se rendre à l’évidence : Edwards a aussi bien réussi son scénario (en collaboration avec John C. Champion) que son interprétation, et il gardera tout le temps une belle estime pour ce Justicier de la Sierra.
Parmi les multiples idées ou situations réjouissantes, ou peu banales, que l'on rencontre tout au long du film (toutes dues probablement en grande partie à Blake Edwards) : la façon qu’a Rod Cameron de manger au comptoir du saloon, celle qu’il a de chantonner alors qu’il est à cheval, son dialogue presque surréaliste avec Reed Hadley lors de leur première rencontre, la façon "folklorique" de se vêtir des "bad guys" et notamment Blake Edwards, ses bottes fantaisistes et ses gants noirs… Pas mal de ruptures de ton (la longue scène au cours de laquelle Rod Cameron raconte à Blake Edwards sa rencontre avec Billy le Kid, une histoire dont la chute est tout aussi inénarrable que la réaction du personnage joué par Edwards), une certaine sensibilité (les relations amicales entre John et le shérif, qu’il est néanmoins obligé de blesser afin de pouvoir s’enfuir) et quelques séquences qui semblent être passées comme une lettre à la poste sous le nez de la censure : il n’était effectivement pas très courant à l’époque de voir un couple se jeter à terre pour se prendre dans les bras et s’embrasser. On trouve également un gunfight nocturne superbement bien éclairé, un splendide final sous la pluie avec l’évanouissement fantomatique du personnage principal en fond de plan à la dernière seconde, un combat à poings nus très bien rythmé d’une longueur et d’une sauvagerie assez étonnante, sans oublier une efficace course-poursuite à cheval au milieu des rochers de Lone Pine. Bref, il y en a pour tous les goûts, aussi bien pour les amateurs d’action que de bons dialogues.
Le casting s’avère de bonne tenue lui aussi ; outre Blake Edwards qui nous surprend agréablement, Rod Cameron dans la même lignée de jeu que Randolph Scott s’en sort pas mal du tout, très bien entouré qu’il est par deux charmantes actrices, Anne Gwynne et surtout la splendide Clementine de John Ford dans La Poursuite infernale (My Darling Clementine), Cathy Downs, ainsi que par un Reed Hadley vicieux à souhait. Un polar-western sans prétention mais très plaisant, filmé dans des extérieurs bien choisis, mélange assez homogène d’action, de romance et d’humour. John C. Champion et Blake Edwards avaient eu l’intention de produire ce western en 16 mm ; mais après avoir soumis leur projet à deux studios, ils se rendirent compte que leur histoire avait plus de potentiel qu'ils ne l'avaient imaginé. Un deal fut donc arrangé avec la Monogram, qui participa au financement et aida les producteurs à se faire distribuer. En 1966, Lesley Selander réalisera un remake de son propre film : The Texican avec Audie Murphy et Broderick Crawford. L'original est en tout cas bien sympathique !


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le 13 janv. 2018

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