J'ai presque tout dit dans mon titre. Les deux héros du film sont : le chef d'un gang de voleurs de motos traqué par les forces de police pour avoir abattu par mégarde un des leurs, et une jeune prostituée appartenant aux baigneuses qu'un maquereau nommé Hua Hua fait travailler sur les rives du Lac aux oies sauvages. Ils se rencontrent dans la première scène du film, près d'une gare, sous une pluie évidemment battante, et on va les suivre, tantôt ensemble tantôt séparément, jusqu'au générique final. On aura, entre-temps, exploré les bas-fonds de Wuhan (10 millions d'habitants), chef-lieu de la province chinoise de Hubei (intérieur sud du pays), notamment au moyen des deux longs flash-backs de la première moitié du film (qui, oui, peuvent apparaître comme une facilité scénaristique).
Violence, humour (éventuellement macabre) ; beauté du diable des deux héros principaux ; beauté des images, souvent nocturnes, quelquefois plein soleil, magiquement photographiées par Jingsong Dong ; policiers qu'on a un mal de chien à distinguer des truands (avec quasiment le même look et les mêmes façons de faire) ; mystère et ambiguïté des personnages féminins dont on se demande toujours pour qui ils travaillent, ce qui les meut, leurs réelles intentions ; chasse à l'homme frénétique (celui qui permettra à la police d'arrêter le gangster recherché empochera 300.000 yuans) le long des ruelles, ou dans les baraquements plus ou moins sordides, des bas-quartiers de la ville, voire en plein zoo. Noblesse grave (et résignée ?) du gangster pourchassé, fragilité exquise et mutique de la mystérieuse baigneuse qui, quand même navrée du sort annoncé du gangster, essaie de l'inciter à fuir la nasse dans laquelle il se débat.
Un film étrange, superbe, romantique, fascinant, dont je n'ai découvert pleinement les mérites qu'après une seconde vision, et qui en dit quand même long sur la Chine d'aujourd'hui.
Casting et interprétations de grande classe (principalement des deux héros). Excellente mise en scène et réalisation de Diao Yinan.