Les enfants, c'est l'heure de la récré !

Voilà l'exemple typique de film qu'il ne faut pas spoiler pour pouvoir l'apprécier, et s'enthousiasmer comme un gamin devant ce jeu récréatif et joyeusement régressif de bout en bout. Par conséquent, je ne trahirai rien de l'intrigue, et j'essayerai de vous convaincre de vous jeter sur ce bijou si vous ne l'avez pas encore vu.

C'est simple, j'étais comme un fou dès que j'ai compris qu'il ne s'agissait que de jeu/jeu/jeu/jeu, à base de chausse-trappes, pièges, feintes, et surprises machiavéliques en tout genre.

Le film est génial car il confronte pendant 2h20, deux antagonistes aux préoccupations d'adultes, qui ne sont en réalité que des enfants attardés, perdus dans un univers d'automates et de jouets franchement effrayant (sublime manoir baroque), et acteurs/réalisateurs de leur propre polar parodique et délirant, à base de retournements de situations de plus en plus démoniaques.

Dans ce clash des titans, on a d''un côté, Laurence Olivier épatant de loufoquerie, la moustache frétillante, le regard sournois et toujours aux aguets pour fomenter un sale coup imprévisible, et de l'autre Michael Caine formidable contrepoint pince-sans-rire.

Confrontation dantesque sublimée par des dialogues absolument remarquables, incisifs, absurdes, moqueurs (des personnages, de l'histoire du film lui-même, et des polars en général), extrêmement habiles (ou l'art de mener le spectateur par le bout du nez sans qu'il ne se doute de ce qui va être prochainement abordé). Ou comment le jeu au départ bon enfant, finit par virer dans la perversité la plus totale, l'humiliation, la susceptibilité et la guerre d'égo (Hollywood?).

Et enfin ce tour de force extraordinaire de Mankiewicz, parvenant à insuffler de vraies idées de cinéma dans un matériau totalement théâtral, je pense aux passages en caméra subjectives, la transition initiale de la peinture d'une scène de théâtre au "réel", aux nombreux plans sur les automates (m'ayant rappelé furieusement le film The Game de Fincher, mais aussi au niveau du scénar d'ailleurs, c'est la même idée) eux-aussi spectateurs de la mascarade, à la science du cadrage, et à la restitution d'une ambiance ultra immersive et donc hyper prenante.

Dans les très légères réserves que je pourrais émettre, ce serait un léger ventre-mou, et une fin un peu prévisible.
Reste cependant ce sourire inoubliable de Michael Caine, en apothéose finale s'écriant "it was all just, a bloody game",

Être réalisateur, faire du cinéma, ça n'est finalement qu'un moyen de ne jamais quitter le monde de l'enfance et de jouer, et c'est ce que je retiendrai ici, un réalisateur et deux acteurs qui s'amusent comme des fous de la première à la dernière minute du film, et ça fait sacrément plaisir à voir.
KingRabbit
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le 20 juin 2013

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KingRabbit

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