Redécouverte des films de Philippe Garrel : un Cinéma de la matière pour le moins évocateur, peuplé de longs métrages au Noir et Blanc fortement contrasté et de figures tour à tour romanesques et symboliques. Un an après Le Révélateur ( magnifique morceau de cinéma intégralement silencieux et puissamment expérimental ) Philippe Garrel nous offre Le lit de la Vierge, potentielle relecture de la vie de Jésus à l'atmosphère onirique et au rythme soutenu.
Le film - jalonné de plans-séquence baignant dans une texture granuleuse voire bouillonnante - est un pur rêve de cinéma situé à mi-chemin entre le surréalisme des premiers films de Luis Bunuel ( principalement Un Chien Andalou et L'âge d'Or ) et la portée mystique de certains métrages de Pier Paolo Pasolini. La présence en tête d'affiche de Pierre Clémenti n'est du reste certainement pas un hasard, l'acteur ayant tourné la même année dans Porcherie, autre film démythifiant la figure christique à des fins poétiques...
Le film ne cherche aucunement à paraître sympathique aux yeux de son audience, en permanence en recherche de grâce et de beauté volée aux moments captés par la caméra de Garrel. Il est à voir comme une variation passionnante du parcours du Christ, filmée sur le mode de l'abstraction voire de l'épure. Un film visuellement magnifique et rythmiquement revêche, à la fois atemporel et étrangement contextualisé, capable de laisser surgir des nappes rock'n'roll au détour d'une scène biblique ou des visions fantasmatiques de rêve charbonneux. A redécouvrir impérativement en 35mm, tant le grain de l'image semble littéralement fulminer sous nos yeux hagards devant tant de beautés arides et sidérantes. Superbe.