D’une grande fidélité à l’égard du roman de Boulgakov réputé pourtant inadaptable, sacrifiant parfois la magie de l’œuvre originale sur l’autel du blockbuster contemporain – les effets visuels s’avèrent récurrents et très visibles –, Master i Margarita nous emporte dans un univers dense où règnent paranoïa et faux-semblants, recompose une comédie sociale du système soviétique dans lequel les discours communistes servent de façade au mode de vie bourgeois. Sa qualité principale est la lisibilité du récit, sans jamais le simplifier ni l’atrophier : se confondent les intrigues politiques et sentimentales, les registres historiques, polémiques et merveilleux – en ce que la surnature est acceptée comme telle par les personnages principaux –, les temporalités et les espaces. La mise en scène aérienne restitue le souffle et la libre circulation du roman qui, chapitre après chapitre, partie après partie, reconfigurait sa narration en faisant dialoguer le jugement d’un artiste et celui du Christ, les manœuvres malignes, les actions néfastes d’ambitieux ou d’égarés rattrapés par le poids de leur conscience ou de leurs responsabilités. Une belle réussite qui accomplit l’exploit de la cohérence en portant à l’écran un classique dissident de la littérature russe.