Recette du films à oscars - Facile à préparer - Budget abordable



Commencez d'abord par parler d'une histoire vraie sans prendre de grands risques. Quoi de mieux que de parler de la ségrégation raciale aux Etats-Unis? Après tout le racisme c'est pas bien et si on le dit pendant deux heures, il y a moyen qu'on décroche notre Oscar. Pensez ensuite à la palette de stars. Ne vous inquiétez pas, ça ne coûtera pas cher. Ils prendront tous plaisir à jouer dans ce film pour peau de chagrin et dire aux interviews télé qu'ils ont accepté de jouer un rôle car ce film est essentiel pour le devoir de mémoire et autres conneries qui passent bien pour soigner son image. Encore une fois, il y a moyen que l'on décroche quelques oscars dans les catégories d'acteurs.



Donc voilà, déroulez votre film de façon chronologique. Commencez dans les années 1920 dans le Sud des Etats-Unis. Montrez une femme de couleur violée et l'assassinat de son mari dans la minute qui suit par un méchant blanc parce qu'il a osé dire "Hey". Plus tard vous remontrerez ce méchant blanc histoire de dire "Vous avez vu comme il était méchant? On revient de loin hein?"
Ensuite procédez de la façon suivante. Parlez de l'histoire des Etats-Unis au vingtième siècle, mais expédiez-la histoire de tenir les 2 heures sans soucis. Mentionnez vite fait Eisenhower, il a fait des trucs biens pour les afro-américains mais on s'en fout, il est républicain. Ensuite faîtes-en des caisses sur Kennedy car c'est le premier à s'être vraiment mouillé pour les droits des noirs américains (puis il était démocrate). Saupoudrez la scène de son tragique assassinat par de bonnes doses de musique triste jouée au piano ou au violon (au choix).

Bien entendu, pensez à parler de la vie de famille de Forest Whitaker, alias Le Majordome. Déjà faîtes-le jouer un rôle de gentil soumis, il a le physique pour. Puis le public l'aimera, il aura son Oscar. La vie du vrai majordome devait être assez chiante en fait, alors rajoutez-lui un fils Black Panther et qui tombe par hasard sur le Ku-Klux Klan au coin d'une rue. Comme ça on fait une bonne opposition père-fils qui se réglera par un gros câlin (sous fond de violons).
Rajoutez Oprah Winfrey, la personnalité la plus influente de la télévision, et vous attirerez l'américain moyen en salles très facilement. Et filmez les scènes du quotidien où il ne se passe rien. En fait voilà, faîtes un film plat mais le label "histoire vraie" accompagné d'une sauce de stars assurera sans problème le succès du film, même si c'est chiant.


Et puis voilà, pas besoin de creuser pour donner du goût à votre mets. Survolez votre sujet, vous vous en foutez, vous parlez de la ségrégation raciale aux Etats-Unis et la ségrégation raciale c'est le Maaaaaaaal. Empruntez des schémas remplis de facilités avec une dualité blanche-noire primaire et terminez sur la victoire, sur la délivrance. Terminez sur la victoire de Barack Obama que vous célébrerez en dix minutes à la fin avec des violons et des larmes. En fait voilà, réglez toute l'affaire par un gros bisou démocrate et vous torcherez votre film sur une note joyeuse.

Bien entendu vous aurez pris soin de ridiculiser Nixon une fois de plus en faisant jouer Cusack dans le rôle pour mieux l'enterrer (de toute façon on s'en fout, il était républicain). Ah oui puis montrez aussi que Reagan était un fin calculateur qui ne pouvait inviter le majordome à sa table sans être calculateur. De toute façon on s'en fout, il était républicain (mais incarné par Alan Rickman et ça, c'est la classe!)

Donc voilà, une fois toutes ces étapes respectées, vous aurez accouché d'un bon films à Oscars qui devrait faire son effet. Prenez des raccourcis historiques, faîtes un bon pudding aussi consensuel qu'indigeste. A savoir un machin trompe-l'oeil et particulièrement vomitif une fois que l'on gratte la couche d'académisme et de bien-pensance. En gros vous pensez avoir affaire à un gâteau au chocolat, mais il s'agira d'un étron faussement profond, profondément faux et simpliste au possible. Mais pas grave, ça marchera. Ah oui puis n'oubliez pas l'argument marketing de dernière minute: Le héros dont on fait l'éloge à la fin a pleuré devant. Servez-vous en!


NDLR: Finalement quelle mauvaise langue je fus. Bien fait pour ta gueule quand même, méchant film! T'es mauvais Jack!
Moorhuhn
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le 7 oct. 2013

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