Si le cinéma italien nous a offert quelques chef d’œuvres d'épouvante gothique avec les films de Mario Bava, Ricardo Freda, Mario Caiano ou Antonio Marghereti, il a également engendré dans son sillage des films beaucoup moins prestigieux à l'image de Metempsycho allias Le Manoir Maudit sorti en 1963, seul et unique film de Antonio Boccaci.
Le Manoir Maudit s'articule autour d'une histoire assez vague et vaporeuse, il est question d'une jeune femme sosie d'une comtesse décédée, d'un château avec des monstres et des fantômes, d'un trésor cachée et d'une enquête autour de deux jeunes filles retrouvées mortes près de ce même château.
Sans faire grande offense à Antonio Boccaci qui est ici à la fois scénariste, acteur et réalisateur on comprend pourquoi Le Manoir Maudit reste son seul et unique film sous ces trois casquettes. Même si on sent qu'il a voulu mettre toutes les chances de son côté avec la panoplie complète de l'horreur gothique transalpine dans son film ; il ne reste guère que le décor de vieux château et le noir et blanc pour faire illusion, et encore .. Le décor massif et imposant de ce château médiéval n'est jamais pleinement exploité, voir ridiculiser lorsque deux personnages défoncent un lourd mur en pierre qui tremble comme du carton sous les coups de bélier qu'ils donnent à l'aide d'une poutre . Quant au noir et blanc il lui manque la présence d'un grand directeur de la photographie pour le magnifier au delà de son aspect naturellement très cinématographique, ce sera d'ailleurs l'unique film de Francesco Campitelli à ce poste avant de s'orienter vers la production. Bizarrement c'est l'aspect assez vague et parfois assez incompréhensible du scénario qui donne au film un certain charme , celui d'un étrange cauchemar gothique dans lequel les errances passeraient presque pour les prémices d'un univers. On se ballade en effet pas mal dans les couloirs et les coursives en tenant une bougie à la main et si ça ne fait pas vraiment avancer l'intrigue ça passe toujours le temps pour atteindre la durée réglementaire d'un long métrage. En tout cas lorsque l'héroïne déambule en chemise de nuit transparente tel une somnambule on penserait presque à du Jean Rollin mais malheureusement en plus habillé.
Pourtant si Le Manoir Maudit n'est pas un grand film et qu'il tire souvent à la ligne on ne s'ennuie pas pour autant. Tout d'abord le film offre une belle galerie de freaks et de personnages avec les apparitions du fantôme de la comtesse, une armure vivante, un monstre aux allures de yéti qui sort d'une tombe (mais surtout de nulle part), un squelette encapuchonné, un hindou à turban, une chauve souris en plastique et une sorte d'Igor hirsute avec la moitié de la tronche fondue ce qui fait qu'il a un œil carrément au niveau de la narine gauche, si c'est pratique pour vérifier qu'on a pas un truc disgracieux qui pendouille du tarin , c'est pas évident pour séduire les filles, du coup il préfère les enfermer dans une chambre de torture puis les tuer à l'occasion. Le château regorge aussi de rats qui sont joués par des hamsters, si pour la première apparition on sent qu'ils ont tentés de coller une queue de rat à un pauvre hamster figurant qui n'avait rien demandé, par la suite ils ont carrément abandonner l'idée de faire un minimum illusion. Parmi les personnages on découvrira aussi un journaliste dont l'héroïne tombera immédiatement raide amoureuse histoire d'ajouter un peu de romance à l'intrigue.
Alors certes on est bien loin des Amants d'Outre Tombe ou du Masque du Démon mais Le Manoir Maudit déroule son petit univers discount d'épouvante gothique avec une certaine candeur qui passerait presque pour du charme. Si l'unique film d' Antonio Boccaci est loin d'être une réussite il reste un bon petit plaisir de cinéma bis.