Le Masque de Cire est un projet conjointement élaboré par Dario Argento et Lucio Fulci et le film devait même être réalisé par le célèbre metteur en scène de Frayeurs et l'Au-delà qui dans les années 90 était un peu tombé dans l'oubli. Malheureusement Lucio Fulci meurt en 1996 et c'est à Sergio Stivaletti , responsable des effets spéciaux pour Dario Argento, que revient la tâche de mettre en image le script imaginé par Argento , Fulci et Daniele Stroppa (Killing Birds). Après la bordélique et foisonnante explosion du bis à l'italienne des annones 70/80 , le cinéma de genre est plutôt moribond dans l'Italie des années 90 avec simplement Michele Soavi qui surnage un peu et l'une des forces de ce Masque de Cire est incontestablement d'en réveiller les esprits et les outrances du passé.
Nous sommes en 1913 à Rome, un nouveau musée de cire est ouvert spécialisé dans la reconstitution très réaliste d'horribles scènes de meurtres. Lorsque un jeune homme est retrouvé mort de peur alors qu'il avait fait le pari de passer la nuit au sein du musée l'établissement commence à susciter la crainte et la suspicion. C'est dans ce cadre étrange qu'une jeune femme se fait engager comme costumière auprès de l'inquiétant Boris Volkoff ...
Le film commence par une scène un peu étrange avec un Paris de cartoon rococo et naïf faisant penser à un décor en carton d'attraction de foire, puis la scène se poursuit dans une chambre dans laquelle on découvre alors deux cadavres outrageusement mutilés et couvert d'un sang rouge vif éclatant ... L'aspect très graphique de ces deux cadavres savamment mis en scène dans ce décor au départ surréaliste et artificielle fait penser que nous sommes dans une scénographie de ce fameux musée de cire , sauf que des policiers débarquent pour constater le double homicide sauvage et que déjà notre perception du réel vacille. En l'espace d'une seule scène le film revendique une horreur bien plus graphique que réaliste et nous déjà interroge sur notre perception du réel dans un film qui traite justement de ce qui se cache derrière l’authenticité de figures de cire.
Le Masque de Cire est un film très attachant cari bien au delà de ses nombreux défauts il convoque et ressuscite les plus grands noms du cinéma de l'épouvante et de l'horreur transalpine. Au sein d'une ambiance délicieusement gothique et de par son sujet même; le film fait penser à Giorgio Ferroni et son Moulin des Supplices mais le film évoque aussi Mario Caiano (Les amants d'outre-tombe) et Mario Bava (Le Corps et le fouet, Le masque du démon). On pourras également cité Dario Argento (lui même disciple de Bava) pour les lumières baroques et colorés dans lequel baigne parfois le film. Mais le film avec son érotisme trouble et fétichiste lorgne également vers le Giallo de Lenzi et Martino avec cette inquiétante figure de tueur ganté se déplaçant comme une ombre et dont la devise morbide semble être : les femmes et les enfants d'abord. Quant aux outrances d'une horreur éminemment graphique servi par les effets spéciaux du frenchie Benoit Lestang , ils évoquent autant Lucio Fulci que Joe d'Amato et Ruggero Deodato.. Mais bien bien plus loin que l'hommage nationale à la grande confrérie du genre, le film de Sergio Stivaletti évoque aussi les ombres inquiétantes de l’expressionnisme allemand , les figures mythique de l'horreur et l'esprit tourmenté et romantique de l'épouvante gothique. C'est Robert Hossein qui incarne le rôle de cet inquiétant patron de musée obsédé par le réalisme de ces figures de cire et la volonté de capturer pour l'éternité la souffrance intime de la mort. Le comédien est excellent, incarnant avec conviction et sobriété une figure d'artiste torturé, de savant fou et de romantique éperdu qui évoque autant la folie du baron Frankenstein (le personnage s'appelle Boris Volkoff rappelant Boris Karloff) que le fantôme de l'opéra.
Le Masque de Cire est pourtant loin d'être un film parfait et si quelques outrances et effets un peu foireux collent bien à son ambiance globale et son univers bis et gothique d'autres effets spéciaux tirent dangereusement le film bien plus vers la dernière lettre de l'alphabet que la seconde. Le film comporte en effet plusieurs séquences avec des effets spéciaux numériques allant du passable au complètement foireux à l'image d'un incendie numérique assez immonde visuellement. Ces terribles effets numériques sont doublement préjudiciable au film car en plus d'être très moches ils viennent plomber l'ambiance gothique vieille école du film comme un embêtant double anachronisme. J'aurai personnellement clairement préféré des effets spéciaux foireux avec des bouts de cartons...
Le Masque de Cire reste globalement un film très agréable, si la visite du musée est parfois un poil artificiel en revanche il est bon de se laisser hanter par les nombreux esprits qui hante l'entreprise.