Une conjonction, un tir groupé, pourrait laisser penser que le cinéma corse est en pleine expansion. De fait amorcé il y quelques années par De Peretti, un mouvement est bien lancé. Accouchant ces derniers mois de plusieurs ouvrages, tous de qualité (auquel s'ajoute un Borgo, faux frère initié en métropole). Et c'est un dommage.

Arrivé en queue de comète (car une pause à prévoir), Le Mohican ne profite pas du souffle particulier de ses ainés qui nous ouvraient à un nouveau territoire. Le tableau est déjà bien dressé. Car premier constat, "the elephant in the room", un même centre de gravité. En terme de dramaturgie, le territoire Corse a ses spécialités locales qu'il ne semble pas possible de ne poser au menu. Fertile en récits, ce patrimoine finit tout de même par épuiser l'appétit d'un spectateur qui aurait fait ripaille aux autres enseignes.

Donc point la faute de son auteur. Juste celle d'un calendrier. Mais le film pâtit assurément de ce mauvais tirage. Pourtant la manufacture est très propre. Belle.

En première évidence, plus que jamais il est fait démonstration que l'acteur professionnel est un statut tout de même essentiellement économique. Ce qui distingue l'acteur professionnel de l'autre est d'abord que l'un est produit, une marque; et que l'autre est une découverte, souvent source de joie pour le spectateur. Comme dans toutes ses productions corse, l'acteur local est largement convié au casting. Et comme chaque fois, il imprime sa marque.

En seconde, la Corse est paysage de cinéma. Ici de Western. Car c'est un peu ici l'angle d'attaque. Une film de traque, dans une nature sauvage. Là où le film pourrait déstabiliser le spectateur, c'est qu'il n'est pas clairement lisible sur son projet. Semble se dessiner parfois un film d'action (notamment avec cette montée progressive de la violence, plutôt de sa progressive mise en image, du hors champ au plan rapproché). Or l'action, dans son traitement commun, l'auteur n'en a visiblement rien à faire. C'est une évidence pour le traitement de ses scènes qui ne visent jamais à la sublimer (alors que par exemple le décors d'une bergerie, très graphique, offrait des perspectives évidentes. Non exploitées). Aucun des artifices communs n'est utilisé pour en démultiplier l'impact. Au contraire, tout est contenu. Au risque de laisser le spectateur, qui ne sait plus bien où le film va, sur sa faim.

Est-il envisageable, souhaitable, d'aborder le "folklore" Corse sous l'angle du film d'action ? La question reste posée, démonstration n'étant pas faite. C'eut été l'occasion pour ce film de se démarquer. Mais ce n'était visiblement point le projet.

HAL1
7
Écrit par

Créée

le 28 janv. 2025

Critique lue 50 fois

HAL1

Écrit par

Critique lue 50 fois

D'autres avis sur Le Mohican

Le Mohican
Cinephile-doux
7

Chèvres avec vue

Dans ses interviews, Frédéric Farrucci avoue que le sujet du Mohican lui a été inspiré par un documentaire qu'il a tourné il y a quelques années, dans l’extrême sud de la Corse, autour d'un berger...

le 27 oct. 2024

1 j'aime

1

Le Mohican
Oce33140
8

La puissance d'un Mohican

Vu en avant-première au cinéma Le Majestic de Lille en présence du réalisateur Frédéric Farrucci et de l'acteur Alexis Manenti.En plein cœur de l'été, Joseph,l'un des derniers bergers du littoral...

il y a 1 jour

Le Mohican
HAL1
7

La filère corse

Une conjonction, un tir groupé, pourrait laisser penser que le cinéma corse est en pleine expansion. De fait amorcé il y quelques années par De Peretti, un mouvement est bien lancé. Accouchant ces...

Par

le 28 janv. 2025

Du même critique

La Chambre d'à côté
HAL1
7

Drame de toutes les couleurs

Si une stylisation excessive (tous les intérieurs, les costumes, aux palettes de couleurs généreuses, comme manufacturés au millimètre) sied parfaitement le mélodrame, matière première habituelle de...

Par

le 25 déc. 2024

4 j'aime

1

Emilia Pérez
HAL1
6

Ceci n'est pas une comédie musicale

Monsieur Audiard n'aime pas les comédies musicales. Il l'a déclaré mainte fois. Pour être juste et précis, ce qu'il n'aime pas c'est le modèle de comédie musicale tel qu'il fut édifié par Hollywood...

Par

le 18 juil. 2024

3 j'aime

Les Naufragés du Wager
HAL1
6

Très grand script

Hasardeux d'émettre quelques critiques sur un ouvrage ayant suscité une adhésion semble t'il unanime. D'autant qu'il est impossible de ne pas relever la qualité du travail accompli ("travail" étant...

Par

le 9 mai 2024

2 j'aime