Le Mot de Cambronne
5.8
Le Mot de Cambronne

Moyen-métrage de Sacha Guitry (1937)

Avec Le mot de Cambronne (1937), Sacha Guitry (La Poison, Le roman d'un tricheur) verse complètement dans le « théâtre filmé », forme qui lui a souvent été reprochée, niant par là les initiatives de sa mise en scène mais aussi sa légitimité derrière la caméra. Cet opus a donc tendance à alimenter le dossier à charge dressé par les nombreux détracteurs. Ce moyen-métrage (36 minutes) a été tourné dans le décors et avec les acteurs de la pièce originale, centième comédie de Guitry comme il l'indique en introduction, où il dédie son œuvre à la mémoire d'Edmond Rostand. Le film se déroule donc dans une pièce unique, repose presque exclusivement sur ses dialogues et montre tout leur brio toc, sans que l'effervescence habituelle parvienne à imposer sa loi.


Le titre fait référence à une expression française et au mot « merde », répartie bien laconique du général Pierre Cambronne face à l'adversaire britannique qui venait d'en venir à bout. Le fil conducteur est la pression mise par l'épouse de Cambronne (interprétée par Marguerite Moreno) sur son mari pour connaître ce fameux mot. Nous sommes en 1821 et cette dame anglaise vit avec le général déchu dans la campagne nantaise. Elle est plus vieille que lui et a bien le triple de l'âge de la jeune bonne, une fille ravie et mutique interprétée par Jacqueline Delubac ; Guitry coupe la parole mais zoome sur son amante (à ses côtés sur le grand écran dès 1935 avec Bonne chance) et lui laisse le mot de la fin. Il arrive si tard qu'on ne l'attendait plus.


Le mot de Cambronne est une bagatelle, bien lustrée dans le texte mais sans grande pertinence, fonctionnant sur un jeu trop futile même pour une si courte durée ; c'est logique qu'il soit parfois perdu de vue et qu'il ne s'agisse que de meubler en chemin. La participation de Paulice Carton est excellente mais rigoureusement inutile. Le spectateur a le plaisir d'écouter : il y a des punchline intelligentes même si carrément creuses ; quelquefois, du potache maniéré. Les circonstances amènent Guitry à galvauder voire à inhiber son style. Le seul petit moment de folie (lorsque Guitry/Cambronne survient et entame une petite chorégraphie aberrante avec la bonne) est aussi l'unique entracte physique ; cette bouffée d'hystérie gratuite est rafraîchissante au milieu de tant de bavardages sans direction (aussitôt après Guitry se lance dans un laïus robotisé complètement aberrant).


https://zogarok.wordpress.com/2016/02/26/le-mot-de-cambronne/

Créée

le 3 oct. 2015

Critique lue 572 fois

2 j'aime

Zogarok

Écrit par

Critique lue 572 fois

2

D'autres avis sur Le Mot de Cambronne

Le Mot de Cambronne
Plume231
6

Une rime à "perde" ???

Une idée suggérée par Edmond Rostand, auquel il ne manque pas de rendre hommage, à propos d'un mot qui aurait fait selon Victor Hugo de Cambronne le véritable vainqueur de Waterloo, et résultat une...

le 1 janv. 2017

2 j'aime

3

Le Mot de Cambronne
Zogarok
5

Critique de Le Mot de Cambronne par Zogarok

Avec Le mot de Cambronne (1937), Sacha Guitry (La Poison, Le roman d'un tricheur) verse complètement dans le « théâtre filmé », forme qui lui a souvent été reprochée, niant par là les...

le 3 oct. 2015

2 j'aime

Le Mot de Cambronne
Boubakar
5

Ce mot, nous ne le connaissons pas...

Le mot de Cambronne est l'adaptation filmée de la pièce de théâtre du même nom et également crée par Sacha Guitry en 1936. Comme ce dernier le dit, c'est une pièce en un acte et un vers, ce qui...

le 4 mars 2015

1 j'aime

Du même critique

La Haine
Zogarok
3

Les "bons" ploucs de banlieue

En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...

le 13 nov. 2013

51 j'aime

20

Kirikou et la Sorcière
Zogarok
10

Le pacificateur

C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...

le 11 févr. 2015

48 j'aime

4

Les Visiteurs
Zogarok
9

Mysticisme folklo

L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...

le 8 déc. 2014

31 j'aime

2