Frank Oz n’a pas son pareil pour mettre en scène des personnages de tricheurs : qu’il s’agisse d’un commerçant qui ne recule devant rien pour nourrir sa plante carnivore (Little Shop of Horrors, remake 1986), d’un réalisateur raté prêt à tous les canulars pour mener sa production jusqu’au bout (Bowfinger, 1999), d’un cambrioleur talentueux soucieux de réussir un dernier gros coup avant de se retirer (The Score, 2001), d’une femme à la recherche d’une société utopique apte à prolonger l’idéal de la bonne ménagère (The Stepford Wives, 2004), nombre de ses protagonistes vivent dans le mensonge et l’exploitent en champ d’activités lucratives dont ils tirent une satisfaction personnelle.


L’intérêt que présente Dirty Rotten Scoundrels est de réunir deux arnaqueurs dont la vision du monde cynique et l’individualisme qui en découle finissent par s’ébranler au contact de l’autre : chacun voit en autrui un double, regarde en autrui comme dans un miroir déformant ; leur mise en concurrence fait d’eux des acteurs en puissance, dans une mise en abyme du cinéma et de ses artifices chère au réalisateur. Le jeu finit par prendre une importance telle qu’il diminue la vigilance de nos deux séducteurs lancés dans un concours de séduction à tendance homosexuelle – les « frères » ont l’habitude de s’enlacer sur le lit, ce plan au musée composé d’un travelling autour d’une statue d’homme nu dont nous ne voyons que les fesses puis le sexe, à l’origine d’un sursaut de dégoût de la part de Freddy, les marins au bar proposent de l’aide à ce dernier.


Le rapport de compétition mute en relation de domination et de sadisme : le même Freddy est condamné à feindre la paralysie et à subir les humiliations répétées du couple qui se trémousse devant lui puis refuse de l’aider. À terme, les hommes deviennent des bouffons grotesques que guide un culte de la performance et de la possession ; à ce dernier répond l’intelligence d’une femme qui cache son jeu jusqu’au bout. Dirty Rotten Scoundrels est ainsi une leçon de bluff des plus sympathiques à défaut d’être hilarante, portée par des comédiens talentueux.

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le 13 oct. 2021

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