Le Provincial
5.6
Le Provincial

Film de Christian Gion (1990)

Le provincial, comme pratiquement tous les films de Christian Gion, est construit sur l'obsession du rapport à l'autre, de l'étiquette sociale et son corollaire excluant. Abordant ce thème sous ses différentes spécificités tout le long de sa filmographie, Gion oriente son scénario sur la vision condescendante de Paris sur la province, ou plus généralement de la ville sur la campagne.


Pour lui donner plus de poids, Christian Gion, au scénario comme à la mise en scène, s'appuie sur le canevas classique de la comédie romantique. Si par le passé, le cinéaste n’a pas hésité à user d’un comique prononcé, physique avec des gags plus ou moins drôles, ce Provincial fait preuve davantage de retenue, se concentrant sur les enjeux affectifs entre Bernard (Roland Giraud), un célibataire, guide de montagne pyrénéen et Nathalie (Gabrielle Lazure), pubarde parisienne qui se rencontrent à l’occasion de repérages avant le tournage d’une pub en montagne.


De même, la relation entre Bernard et Ernest Cazavant joué par un très étonnant et toujours excellent Michel Galabru ne manque pas d’intérêt. Le vieil acteur alterne savamment entre émotion à fleur de peau et grandes gueulantes dont il a le secret. Et au détour d’une scène de restaurant où il se confie à Giraud, il nous prend aux tripes, avec un rien, une voix qui déraille et des yeux qui s’embuent. Chapeau l’artiste!


Le couple Lazure/Giraud fonctionne plutôt bien. Mais je dois avouer que c’est Roland Giraud qui me fait la plus belle impression. Son jeu est sacrément sûr, sobre comme il faut, projetant une belle sensibilité sur son personnage.


Face à lui, Gabrielle Lazure a un rôle un brin plus compliqué, celui de la jeune femme altière et guindée, quelque peu froide pour tout dire. Fut un temps où sa blondeur m’émouvait force 6-7 sur l'échelle de Grace Kelly. Et le temps a passé. J’ai l'impression qu'il lui manque un peu de chair, de sensualité, de force de caractère pour créer cette petite étincelle de charme qui nous marque de façon indélébile.


Si, encore une fois avec Christian Gion, on peut déplorer une certaine forme de naïveté dans le fond comme dans la forme, il n’en demeure pas moins vrai que sa tendresse évidente pour ses personnages finit toujours par toucher le spectateur, sauf à y être désespérément insensible. Dans ce Provincial peut-être plus que dans ses autres films, cette démonstration d'affection même pour son personnage principal est plus que manifeste. Roland Giraud n’est jamais pris en défaut face à ses adversaires du moment, des monstres de snobisme qui, opposés à de bien plus grandes forces, révèlent le pire : une lâcheté doublée d’inconsistance qui met d'autant en valeur la constance et la pureté du héros principal.


En outre, Christian Gion donne à sa thèse un écrin qui, à titre personnel, me touche aisément : le Sud-Ouest, les Pyrénées. Entre palombières, match de rugby, paysages, langue et accent, l’environnement m’est tellement familier, je suis naturellement déjà séduit. Aujourd’hui que j’ai migré vers un sud plus méditerranéen, la parfum gascon et les souvenirs de jeunesse viennent chatouiller ma fibre nostalgique, forcément, et rendent le visionnage plus agréable sans doute.
captures et trombi

Alligator
7
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le 21 juin 2017

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Alligator

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