Meilleure adaptation de la nouvelle de Poe ("Le Puits et le Pendule") que j'aie pu voir jusqu'à présent en terme d'atmosphère. En ce qui me concerne, ce n'est pas la fidélité littéraire que je recherche en priorité, mais plutôt l'équivalent cinématographique de l'ambiance et des sensations d'angoisse ou de terreur que les nouvelles de Poe provoquent à leur lecture.
Question ambiance, on est servi dans ce court métrage muet en noir et blanc filmé en caméra subjective, saturé de sons répétitifs sinistrement mécaniques et des halètements angoissés du prisonnier. C'est une adaptation viscérale et douloureusement sensorielle, un concentré d'angoisse pure. Vous entendrez le grincement des chaînes et le balancement du pendule géant, vous sentirez son souffle sur votre visage, l'odeur du métal, les murs brûlants de la cellule qui se rapprochent, vous verrez les rats approcher de votre visage.
Le sadisme de la nouvelle est terriblement présent, avec cet enchaînement de tortures interrompu par de brefs moments d'espoir toujours anéantis.
Le court métrage n'est pas fidèle du point de vue littéraire, puisque la fin diffère radicalement de la nouvelle de Poe.
Bizarrement, celle-ci se termine bien. Le film de Svankmajer finit mal et cette fin magnifiquement ironique et cruelle paraît bien plus cohérente avec tout ce qui a précédé. Après tant de supplices raffinés et insensés, qu'attendre d'autre que cette ultime claque d'humour noir qui tue toute espérance et renvoie le prisonnier à son destin funeste ?
Qu'importe si la fin diffère. Svankmajer a parfaitement saisi l'essence de la terreur viscérale et le désespoir de la nouvelle et c'est l'essentiel.