Dans la Chine du XIVème siècle, une secte d’assassins s’empare d’une relique permettant de régner sur les arts martiaux. Mais sa plus fine lame, la tueuse Bruine, disparaît avec ces restes sacrés et change de vie. Elle renaît sous une nouvelle identité, mais ses anciens camarades la poursuivent sans relâche…
Chao-Bin Su n’est pas un réalisateur très connu. Il est surtout scénariste et a écrit cette histoire. John Woo, en revanche, n’est plus à présenter. Pour ce film de wuxia, le casting est solide : le couple de héros est campé par Michelle Yeoh et Jung Woo-sung, deux vétérans exceptionnels. On trouve également le charismatique Wang Xueqi, le sympathique Shawn Yue, ou encore cette peste de Barbie Shu.
L’histoire est académique et se compose d’éléments, certes, classiques, mais de grande qualité. Dans la galerie d’assassins, chacun possède un style martial spécifique qui rend les combats variés. Les personnages civils ont un rôle précis qui jalonne l’histoire afin de faire grandir les héros. Enfin, les décors symbolisent les différentes étapes de l’évolution : l’éveil spirituel dans la grotte, la vie civile en ville et la fin d’une existence dans le cimetière. Sans oublier l’amour, présent dès le début sous la forme du pont de pierre, pont que tout le monde recherche, même ce monstre de Roi de la roue.
Et c’est d’ailleurs le fil conducteur de cette œuvre. Le règne des assassins est avant tout une romance malgré la brutalité de son histoire. L’amour y est présenté comme l’ennemi mortel du combattant qui le fait invariablement renoncer à la violence, même celle légitime de la vengeance pour le fils du Premier ministre Zhang. Chaque guerrier sait que, le jour où il offrira son cœur, il cessera de se battre. De plus, la dimension spirituelle de cette démarche est mise en avant. La sagesse, symbolisée par le moine, pousse le combattant à embrasser ce destin pacifique afin de se débarrasser du mauvais karma accumulé par toutes les morts qu’il a provoquées. Le guerrier apaisé peut dès lors se satisfaire des plaisirs simples du quotidien, représentés par la nourriture comme la pyramide de tofu ou les nouilles que prise particulièrement Lei Bin. Ce personnage est d’ailleurs le miroir négatif de Bruine. Lui aussi a trouvé l’amour et la possibilité de la rédemption, mais il est incapable de l’accepter. Il comprendra et le regrettera à la fin, lorsqu’il mange des nouilles pour la dernière fois et qu’il réalise ce qu’il a perdu.
Le scénario ressemble à une enquête policière que le spectateur ne peut que suivre sans la devancer, faute d’éléments. C’est un peu agaçant, l’explication de la fin est cousue de fil blanc et d’une naïveté attendrissante, mais ce n’est pas grave. L’histoire est tellement belle qu’on lui pardonne son intrigue simple.
Le règne des assassins est une œuvre splendide du genre wuxia, portée par des artistes de grands talents à toutes les étapes de sa création. L’histoire épique, romantique, violente et spirituelle apporte beaucoup au spectateur. Une telle richesse ne doit pas être négligée.